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d’un chevelu radiculaire plus abondant que chez les vignes en terre compacte, et si le drainage naturel opéré sur les nodosités des racines, quand elles sont dans un milieu perméable, ne soustrait pas en partie ces nodosités à la pourriture qui constitue leur fin naturelle. Quoi qu’il en soit de cette question encore à l’étude, l’ensablement est par lui-même un excellent procédé pour soutenir la vitalité de la vigne; son seul défaut est de n’être applicable que dans de rares localités et de coûter toujours très cher quand il faut remplir de sable des cuvettes creusées au pied des ceps. C’est par un privilège très spécial que M. Espitalier a pu défendre contre la mort un vaste vignoble planté sur un fond de marais vaseux, mais sur lequel des dunes rendues mobiles par l’arrachage de leur végétation arbustive laissaient emporter par le vent leurs sables désagrégés et bientôt répandus en nappe épaisse à la surface des jeunes vignes. A Maguelone, près Montpellier, le transport du sable de mer a constitué pour les taches phylloxériques un moyen d’arrêt assez coûteux, mais plus efficace que les engrais.

Ceci nous conduit aux engrais eux-mêmes, considérés en tant que soutiens de la vigueur de la vigne et soigneusement distingués de toute substance insecticide. En prenant pour type de ces matières purement fertilisantes le fumier de ferme, on enregistrera bien vite l’insuccès de ce traitement nutritif. La présence même du fumier pailleux fait développer sur les racines des plants infectés un chevelu très abondant, où l’insecte pullule avec plus de fécondité que dans les terres infertiles. La reprise momentanée de la vigne n’est qu’un effort temporaire que suit un rapide épuisement. Aussi les p)artisans des engrais simples deviennent-ils de plus en plus rares, et l’attention se porte-t-elle aujourd’hui sur les engrais qui, par eux-mêmes ou par addition d’autres substances, sont à la fois fertilisans et insecticides; mais avant d’aborder ce dernier groupe il nous paraît logique d’étudier à part les insecticides purs.

Le plus simple de ces insecticides est évidemment l’eau pure employée sous une pression assez forte pour chasser l’air de la surface du corps de l’insecte et produire à la longue sur ce dernier une véritable asphyxie. Telle est l’explication plausible des effets très positifs de la submersion totale des vignes, système imaginé, pratiqué, décrit avec soin par M. Faucon, et qui constitue jusqu’à ce jour un moyen à peu près sûr de rétablir des vignes malades et surtout de maintenir celles qui ne sont encore que faiblement attaquées. Quelques échecs partiels ou plutôt quelques retards dans l’effet utile des submersions entreprises dans les plaines du Vidourle, près de Saint-Laurent d’Aigouze et de Marsillargues, avaient jeté, en 1875, un certain doute sur l’efficacité complète de ce procédé.