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de travaux ou d’achats de matériel de chemins de fer[1]. Afin d’éviter toute confusion avec les deniers ordinaires de l’état et d’échapper à toute tentation d’en faire un autre emploi, le gouvernement russe a constitué, avec le produit de ces obligations, un fonds spécial ayant son budget à part, différent du budget général. On a pour cette caisse des chemins de fer fait une exception à la règle nouvellement adoptée par la trésorerie russe de l’unité de caisse. A défaut de leur destination, le mode même d’émission de ces emprunts, appartenant à une vingtaine de compagnies privées, obligeait à une comptabilité distincte et séparée. Voici, d’après le récent compte-rendu du contrôleur de l’empire, quel a été le mouvement du fonds des chemins de fer en 1875[2]. Au 1er janvier, l’encaisse s’élevait à 57 millions de roubles, solde des exercices précédens. Dans le courant de l’année, des rentrées diverses, et en particulier le produit de la cinquième émission d’obligations, ont porté les ressources à plus de 147 millions de roubles, c’est-à-dire à près de 600 millions de francs. Les dépenses effectuées dans l’année en travaux pour les chemins de fer ou les ports, en achat de matériel, en prêts ou en versemens aux compagnies pour les valeurs émises par l’état à leur compte, ne se sont élevées qu’à 65 millions de roubles. Au 1er janvier 1876 il restait ainsi en caisse plus de 82 millions. Je ne sais quelles ont été les dépenses de l’année qui vient de s’écouler, mais il est vraisemblable que ce solde de près de 250 millions de francs n’a pas été entièrement absorbé, en sorte que le fonds des chemins de fer pourrait en certaines éventualités mettre temporairement à la disposition du trésor des ressources toutes disponibles.

Comment les compagnies de chemins de fer répondent-elles aux avances de l’état, comment lui remboursent-elles l’intérêt des sommes empruntées à leur profit? Il est difficile qu’en pareille matière il n’y ait pas eu quelques déceptions. Les recettes provenant des voies ferrées et applicables au service de leurs obligations se sont souvent, dans les dernières années, trouvées inférieures aux prévisions : évaluées à 20 millions de roubles pour 1875, elles en ont à peine donné 17, laissant un déficit d’une dizaine de millions de francs. Seules les lignes de l’état, inscrites au revenu du domaine

  1. D’après les comptes-rendus annuels du contrôleur de l’empire, cette somme se décompose ainsi : en 1870, 73 millions; en 1871, 53 millions; en 1872, 56 millions; en 1873, 69 millions; en 1874, près de 51 millions. Dans le cours de 1875, il a été en outre dépensé 65 millions. À ces sommes doivent s’ajouter les dépenses du ministère des voies de communication effectuées sur le revenu ordinaire de l’état et les crédits extraordinaires alloués aux travaux publics, ce qui en 1875 donnait encore 37 millions de roubles, soit un total de 400 millions de francs pour cette seule année.
  2. Rapport du contrôleur de l’empire sur le règlement définitif du budget de l’exercice 1875. Saint-Pétersbourg, novembre 1876.