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l’harmonie des rapports et de l’exactitude des proportions. Quoi qu’il raconte ou peigne, André Theuriet le raconte et le peint élégamment, sans pour cela rien sacrifier de la vérité à cette élégance. Ses personnages de paysans conservent leur franchise, ses intérieurs de ferme leur réalisme, ses provinciaux leur prosaïsme placide et timide, ses bohèmes parisiens leurs allures turbulentes. S’il est vrai, comme je le disais en commençant, que nos modernes romanciers, comparés à leurs prédécesseurs, rappellent plus l’école hollandaise que l’école flamande, André Theuriet peut nous représenter assez étroitement le Mieris ou le Terburg du roman contemporain, sans mélange aucun de Gérard Dow, de Jean Steen et de Van-Ostade.

Cette qualité d’élégance nous dit assez qu’en devenant romancier André Theuriet a su rester poète. En abordant un art nouveau, il s’est souvenu de celui qui si longtemps avait fait le charme de ses loisirs, et c’est encore au Chemin des bois qu’il a demandé les cadres et les données de ses récits. Il est resté fidèle à sa Meuse natale, et elle lui a prodigué les frais et riches paysages d’une nature sans violence et reposée même dans ses plus altières magnificences, des solitudes verdoyantes pour ses amoureux, des chemins creux et des fondrières sans périls pour ses amazones, des retraites rustiques pour ses soupirans dépités ou heureux, des sentiers perdus sous les taillis épais pour la facilité des confidences et des aveux, des demeures isolées pour ses rêveurs et ses misanthropes. La nature joue un rôle important dans les récits d’André Theuriet ; non-seulement elle compose le fond de ses tableaux, mais elle envahit la scène jusque sur ses premiers plans, et ses personnages y sont comme baignés dans la verdure et dans la feuillée. Quelque chose du calme de cette nature se répand sur les passions du récit ; sans aimer et sans souffrir moins fortement, ses acteurs aiment et souffrent avec moins de bruit, et la solitude où se développe le petit drame de leur amour ou de leur souffrance les garantit au moins contre les complications extérieures et les accidens de l’imprévu. Quelque vive que soit la pièce, elle exclut la multiplicité des acteurs et doit se jouer forcément entré quatre ou cinq personnages. Je ne sais rien, en vérité, qui donne mieux le sentiment de la tranquillité provinciale que les romans d’André Theuriet, tranquillité qui n’est pas si monotone qu’on veut bien le dire, car toute chose y prend un prix précisément parce que les événemens y sont rares. Pas de parole qui ne s’entende dans ce silence, pas d’incident qui ne se détache avec relief sur ce fond de solitude. C’est très justement qu’un critique contemporain a dit d’André Theuriet que la province lui avait porté bonheur. Ce qui est entré de la vie parisienne dans la formation de son talent est peu de chose en comparaison de ce qu’il doit à la province. C’est elle qui lui a révélé les sentimens