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quelques rares petitesses, l’ordre admirable qui y règne et le dévoûment qui en est la règle.


III

Insuffisance des salles de crèches et des services de chroniques, insuffisance des locaux par rapport au nombre de lits qu’ils contiennent, telles sont les défectuosités que nous avons déjà constatées dans les mesures d’assistance hospitalière prises en faveur des enfans. Sont-ce les seules ? Malheureusement non. S’il est un point où les illusions ne soient pas permises, c’est assurément dans toutes les questions qui tiennent à l’hygiène publique et dont dépendent la vie de créatures humaines. Il ne faut donc pas se dissimuler que nos hôpitaux d’enfans n’ont bonne réputation ni dans le monde des médecins ni dans le monde des malades. Si quelques parens insoucians, si quelques nourrices mercenaires sont heureux d’y faire admettre l’enfant dont la maladie leur impose une dépense au-dessus de leur fortune ou des soins au-dessus de leur dévoûment, le plus grand nombre répugne profondément à « mettre son enfant à l’hôpital, » suivant l’expression consacrée, qui dans la langue populaire implique toujours une sorte de blâme. D’un autre côté, des médecins et des chirurgiens appartenant au corps des hôpitaux n’ont pas hésité, dans des documents rendus publics, à qualifier les hôpitaux d’enfans de lieux malsains, dangereux, où les enfans ne devraient être admis qu’en cas d’absolue nécessité. Les chiffres viennent malheureusement à l’appui de cette appréciation sévère. En 1869, la mortalité a été de 1 sur 5 dans les deux hôpitaux d’enfans, si on ne tient compte que des services de médecine, de 1 sur 6 si on y joint les services de chirurgie. Ce chiffre est le plus élevé de ceux fournis par les hôpitaux de Paris, et il apparaît plus élevé encore quand on songe que les hôpitaux d’enfans reçoivent beaucoup de chroniques dont les uns sont plutôt des infirmes que des malades, et dont les autres sont des teigneux, ce qui augmente considérablement la proportion de la mortalité parmi les enfans atteints de maladies aiguës. À quoi tient cette mortalité excessive, dont les hommes de l’art s’affligent à bon droit ? Il est assez difficile de le dire avec précision. Bien que la science hygiénique ait fait depuis quelques années de notables progrès, cependant il y a toujours des causes qui lui échappent et des résultats qui la déconcertent. Les hôpitaux dont l’installation est jugée la plus défectueuse ne sont pas toujours ceux où sévit la mortalité la plus grande, tandis que d’autres, construits suivant toutes les règles de l’art, sont beaucoup plus cruellement éprouvés. Il y a là des phénomènes complexes,