comte Stolberg, est chargé d’annoncer au baron que sa majesté le roi de Prusse désire lui parler de la Belgique. Un matin, M. de Humboldt va le trouver et l’introduit auprès du roi. Voici le récit de cette conférence, tel que Stockmar l’a tracé. Nous traduisons littéralement :
« … Le roi me reçut d’une façon très amicale. Il commença par m’exposer ses devoirs envers l’Allemagne ; il parla longtemps avec suite, avec bonheur, je dirai même avec éloquence. C’était lui, disait-il, qui était le représentant naturel de l’honneur et de la prospérité de l’Allemagne. Comme tel, il avait l’obligation d’avoir les yeux ouverts sur le péril qui peut menacer l’Allemagne du côté de la Belgique. Il considérait l’indépendance de la Belgique comme une situation tout à fait précaire qui durerait à peine deux générations. Le danger qui menaçait la Belgique ne pouvait venir que de la France. Il désirait donc qu’il fût possible à la Belgique de se rattacher à l’Allemagne, de se faire admettre dans la confédération germanique. Là seulement il pouvait voir pour la Belgique et son indépendance une garantie de durée. Il ne se dissimulait pas les obstacles que la constellation actuelle de la politique opposerait à l’accomplissement de son désir. Aussi n’exercerait-il aucune pression à ce sujet, ne voulant pas créer de difficultés nouvelles. Il ne demandait qu’une chose : la promesse que la roi Léopold entrait loyalement dans ses vues, qu’il adopterait le système politique le plus propre à les faire réussir, qu’il le maintiendrait fidèlement et s’efforcerait de réaliser ce dessein en des circonstances plus favorables. Il me laissa entendre que le roi des Belges lui paraissait fort enlacé dans les liens de la politique et de la parenté françaises. Il me sembla juger exactement la crise possible qu’amènerait la mort du roi actuel (Louis-Philippe), étant donné le caractère de son successeur (le duc d’Orléans). Il me dit : « En France aujourd’hui, il n’y a plus ni religion ni morale, c’est un état social entièrement pourri, comme celui des Romains avant la chute de l’empire ; je crois que la France s’écroulera de la même manière. » Revenant à la Belgique, il me répéta qu’une garantie des loyales dispositions du roi Léopold, au sujet des rapports de la Belgique avec l’Allemagne, était ce qu’il désirait le plus vivement. Une telle garantie exercerait une influence particulière sur sa politique au sujet des forteresses belges, car ni lui ni aucun de ses généraux ne pouvait mettre en doute que ces forteresses, si la guerre éclatait, ne tombassent immédiatement, d’une manière ou d’une autre, aux mains des Français. La décision qu’il prendrait dans cette affaire dépendrait donc de sa confiance dans les intentions politiques du roi Léopold.
« Stolberg m’avait assuré, que Metternich avait maintenant moins d’ascendant, moins d’influence que jamais sur le roi de Prusse. Une partie du discours du roi, qui se rapportait à Metternich, me parut