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et il les résume par un seul mot : « le sénat aura les mêmes attributions législatives que la chambre des représentans. »

La retraite de M. Thiers, le 24 mai, eut pour conséquence de faire ajourner l’examen du projet de loi présenté par son gouvernement. La loi du 20 novembre suivant, assignant une durée de sept années aux pouvoirs du maréchal de Mac-Mahon, régla d’une façon toute différente un des points fondamentaux de notre organisation politique. En conséquence, la commission chargée de préparer les lois constitutionnelles provoqua elle-même le gouvernement du maréchal à faire connaître ses vues. Un nouveau projet de loi fut donc rédigé par M. le duc de Broglie et présenté à l’assemblée nationale, au nom du gouvernement, dans la séance du 15 mai 1874. L’article 18 de ce projet de loi était ainsi conçu :


« Article 18. Le grand conseil (ainsi devait s’appeler le sénat) et la chambre des représentans ont l’initiative et la confection des lois. Toutefois les lois de finances doivent être présentées en premier lieu à la chambre des représentans. Quand une loi a été adoptée par les deux chambres, le président a le droit de réclamer une seconde délibération dans les conditions indiquées par l’article 2, § 2, de la loi du 13 mars 1873. »


Ici encore point de restriction à l’égalité des pouvoirs entre les deux chambres en matière de législation. Si nous interrogeons l’exposé des motifs, nous y voyons qu’après avoir expliqué par des considérations qui ne diffèrent point de celles que M. Dufaure avait présentées, la nécessité d’établir deux chambres et de leur donner une origine différente, M. de Broglie place sous l’autorité de l’histoire le principe de partage égal du pouvoir législatif.


« Nous dirons peu de mots des attributions des corps ainsi constitués, car là encore tout est emprunté à la pratique habituelle des pays libres. C’est en vertu d’une règle générale, admise dans tout régime parlementaire, que nous vous proposons de partager à titre égal, entre les deux assemblées, l’initiative et la confection des lois, tandis que certaines attributions judiciaires sont destinées à celle des deux qui, par sa composition, doit se rapprocher de la gravité d’un corps de magistrature. »


C’est donc la tradition de 1814 et de 1830 que le projet de loi de M. de Broglie entendait continuer, et l’on a vu que, dans cette tradition, la priorité de discussion attribuée à l’une des deux chambres n’enlevait rien à la liberté d’examen et de révision de l’autre chambre. La commission des lois constitutionnelles se plaça au même point de vue que le gouvernement, et elle adopta pour l’article