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source d’inépuisables richesses. Mais il fallait aller lentement, car le parlement se serait effarouché de la dépense que cela devait exiger. Il commença donc par un musée où s’entassèrent bien vite les échantillons de toute sorte; alors un laboratoire fut jugé nécessaire. Enfin en 1845 le Geological Survey obtint une existence des indépendante, il eut son budget propre sous le contrôle commissaires des bois et forêts, il reçut une dotation suffisante pour édifier dans Jermyn-street le monument qu’il occupe encore[1]. Puis il parut nécessaire d’y faire des cours de sciences appliquées, afin que les étudians pussent acquérir toutes les connaissances exigées pour l’exploitation des mines. Le prince Albert, dont les nobles efforts en faveur de l’instruction publique ont à peine besoin d’être rappelés, inaugura lui-même l’école et le musée ainsi réorganisés. De la Bêche reçut à cette époque le tire de directeur général ; deux directeurs, l’un pour l’Angleterre et l’Ecosse, M. Ramsay; l’autre pour l’Irlande, le capitaine James, du corps des ingénieurs militaires, furent spécialement chargés des explorations sur le terrain ; un nombreux état-major de jeunes ingénieurs leur était adjoint pour ce travail.

Sir Henry de la Bêche, après avoir créé de toutes pièces cette belle institution, en était resté l’inspirateur. Bon géologue d’ailleurs, il possédait en outre des connaissances assez étendues pour comprendre que la géologie ne doit pas s’isoler des autres sciences. Personne ne contestait plus l’utilité de l’établissement qu’il avait organisé avec tant de persévérance. Au contraire, l’exposition universelle de 1851 avait laissé l’impression que la Grande-Bretagne devait, sous peine de déchoir, faire de nouveaux sacrifices pour l’enseignement technique. Il fallait, par conséquent, mettre à la tête du Geological Survey un homme dont la parole eût de l’autorité auprès du parlement, du public, des ministres. C’est à ce titre que Murchison fut choisi. Il n’y avait pas à compter qu’à son âge il pût acquérir les mœurs administratives, ni qu’avec une santé déclinante il suivît ses subalternes par monts et par vaux; mais il sentait bien que le devoir d’un chef d’administration est moins de prendre une part quotidienne à une besogne monotone que d’exercer un bienveillant patronage sur le personnel qu’il dirige. Il eut, sous ce rapport, une influence heureuse sur les travaux du Geological Survey,

  1. Il avait été convenu d’abord, pour plus d’économie, que l’étage inférieur de cet édifice serait disposé en boutiques ; les géologues s’y opposaient. Les commissaires des bois et forêts suppliaient le chancelier de l’échiquier, sir Charles Wood, de consentir à cette modification. « Vous voulez dénationaliser cette nation de boutiquiers, répondit celui-ci; je ne puis vous résister. » Peut-être aurait-on pareille histoire à raconter sans avoir besoin de passer la Manche.