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Elle n’en demande pas moins : la transformation du matériel, l’amélioration des ports et de leur outillage, l’abaissement des tarifs des chemins de fer, la suppression des droits de quai et des charges qui pèsent spécialement sur les armateurs, et l’établissement d’une société de crédit maritime. Ce programme est long, quoique modéré ; mais l’école libre-échangiste eût du nous indiquer où l’état pouvait trouver l’argent nécessaire à la réalisation de ces réformes.

M. Lecesne, député de la Seine-Inférieure, a déposé de son côté une proposition de loi que nous ne pouvons que résumer : maintien de l’abolition des surtaxes des pavillons ; maintien des surtaxes d’entrepôt ; extension des franchises de pilotage ; exercice de la visite tous les six mois seulement ; abrogation de la loi du 30 janvier 1872 pour les droits de mutation sur ventes de navires et retour à la loi du 21 avril 1818 ; réduction du droit proportionnel de la patente des armateurs sur le navire ; inscription au budget d’un crédit de deux millions par an, pendant dix années, pour favoriser la construction, qui ne jouirait plus de l’entrée en franchise des matières premières ; création d’un fonds de crédit de 30 millions à ouvrir à la marine, par un contrat à passer entre l’état et une société de crédit, enfin inscription au budget d’un crédit de 8 millions par an, pendant dix années, pour venir en aide à la navigation maritime : chaque unité de tonnage recevrait, par mois de navigation, une prime variant de 50 centimes à 2 francs, selon l’âge du navire, lorsque ce tonnage ne s’appliquerait ni à la grande ni à la petite pêche, ni à une navigation subventionnée. La proposition de loi de l’honorable député de la Seine-Inférieure ne doit pas être du goût de M. le ministre des finances. Pour que ce projet soit accueilli avec faveur par les chambres, il faudra que son auteur fasse toucher du doigt les avantages qui devront en résulter, non-seulement pour la marine marchande, mais pour l’intérêt général. C’est ce dernier surtout que nous ne voudrions pas voir oublier.

Après cette étude sommaire de ce qu’on est convenu d’appeler « la question de la marine marchande, » il faut formuler notre conclusion. Nous la donnerons en peu de mots, en demandant : 1° égalité des impôts de la marine française avec les impôts des autres industries ; 2° égalité des charges de la marine française avec les charges des marines étrangères ; 3° liberté commerciale aussi absolue que possible dans nos ports de mer.

Pour obtenir la première, il faut que le droit proportionnel de la patente sur les navires soit aboli, afin qu’un négociant ne paie plus, en outre de sa patente d’armateur, un impôt de près de 100,000 fr. s’il prend des associés ; — il faut qu’un capitaine au long cours ait la faculté de prendre ses matelots où il pourra en rencontrer, absolument comme un industriel choisit ses ouvriers, avec pouvoir de