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Les Chinois, les Japonais, les noirs, quelques types d’Arabes, de Turcs, de Peaux- Routes, introduisent une diversité pittoresque dans ce concours où toutes les nations ont été conviées, où presque toutes sont venues. Les ladies américaines, élégantes, sveltes, vives d’allures, aussi aimables que les hommes de leur pays en général le sont peu, étalent volontiers leurs toilettes tapageuses venues de Paris, et vont grignottant des douceurs, ou s’asseoient pour prendre une glace, dévorer un sandwich ou humer espiéglement, au chalumeau de paille, une de ces boissons glacées et composites dont elles raffolent. Volontiers paresseuses, elles se font traîner au prix de 50 cents l’heure sur une de ces chaises roulantes dont un particulier a payé le monopole 60,000 francs.

Autour des bâtimens, dans les jardins très heureusement dessinés, semés de fleurs et d’arbustes rares, et où ne manquent ni les lacs, ni les jets d’eau, ni les cascades, on va, on vient, on circule en bandes animées, et comme par endroits le terrain est accidenté, coupé de ravins, orné de grands arbres dont quelques-uns ont dû assister à l’entrevue de Penn et des Delawares, on peut se croire un moment en pleine campagne et s’y livrer à tous ses caprices. Il est tel coin ombreux, tel sentier couvert, tel banc isolé au pied d’un ruisseau discret, où celui qui aime à rêver et à lire vient s’asseoir, et où, il faut bien aussi le dire, la flirtation à l’américaine n’est pas un moment interrompue ; et c’est ainsi que chacun trouve son compte aux arrangemens du parc de Fairmount.

Ce parc, pour la partie surtout qui enserre l’exposition, a une physionomie qu’on n’oublie plus. Dans son ensemble il est non-seulement beaucoup plus étendu, mais encore plus rustique, d’aspect plus pittoresque que le bois de Boulogne, les parcs de Londres ou le Prater. On s’est étudié à rendre des plus attrayans le coin où nous sommes, que baigne la rivière de Schuylkill. Outre les bâtimens dont il a déjà été parlé, il en existe une foule d’autres, çà et là disséminés, qu’un petit chemin de fer en miniature, incessamment parcouru par la petite locomotive Emma, toujours essoufflée, relie aisément les uns aux autres. En moins d’un quart d’heure, chacun peut faire ainsi le tour des centennial grounds ; mais il vaut mieux aller à pied. Ici sont les chalets des divers commissaires étrangers, à la tête desquels on remarque le chalet de la Grande-Bretagne ; là, des cafés, des laiteries, des brasseries, des buvettes, des restaurans, des modèles de maison de ferme ou d’école, édifiés par différentes nations, enfin des cottages, des pavillons de tout genre. Voici le bâtiment du jury « le palais des juges, » et la « banque nationale du centenaire, » où l’on prête de l’argent à ceux qui en ont ; voici la maison « du confort public » : on s’y fait raser, cirer les bottes, on y écrit sa correspondance, on y lunche, on y lit les