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sur le côté ; avec cela elles étaient toutes les deux d’âge plus que respectable et de mine rien moins que jolie. La foule les suivait rieuse, mais contenue. Elles excitèrent un moment les lazzis, quand elles voulurent distribuer au public les brochures qu’elles avaient en mains. La police doucement les pria de s’en aller, et avec beaucoup de ménagement et de respect les conduisit jusqu’à la porte. Elles ne décampèrent point toutefois sans nous laisser leur adresse, et nous donner rendez-vous pour un sermon à domicile.

Presque tous les pays étrangers ont spontanément pris part à l’exposition de Philadelphie. S’ils n’y offrent pas les mêmes élémens d’instruction et de curiosité que les États-Unis, quelques-uns, comme l’Angleterre, la Suède, le Brésil, le Mexique, le Japon, se présentent néanmoins avec un éclat qui a frappé tout le monde. L’Angleterre a conduit à sa suite ses colonies sans en excepter une seule, depuis le Dominion de Canada plus étendu encore en surface que la vaste fédération américaine, jusqu’à la petite île Maurice, notre ancienne Ile-de-France, comme égarée au milieu de l’Océan indien. L’Angleterre occupe, après les États-Unis, la plus grande place affectée aux nations exposantes, et elle l’occupe dignement.

La Suède, fière de ses fers si renommés, offre une exposition métallurgique remarquable. Le Brésil, qui n’oublie pas qu’il a toujours tenu la tête parmi les nations de l’Amérique du Sud, non content de nous montrer ses pépites, ses diamans, ses autres minéraux, exhibe aussi, dans deux pavillons très élégans, les produits de ses manufactures et ses richesses agricoles, son café, son coton, son sucre, ses bois de teinture et d’ébénisterie. Le Mexique, comme si la guerre civile ne le désolait plus, a voulu surtout rappeler qu’il était hier encore, avant que les étonnantes mines de l’état de Nevada ne fussent découvertes, le pays argentifère le plus productif du globe. Entre autres choses, il expose aux regards étonnés le plus volumineux gâteau d’argent qui ait jamais été obtenu, croyons-nous, au four de coupelle. Il suffira de dire que cette espèce de lingot brut a 3 mètres de diamètre, pèse 1,845 kilogrammes et vaut 360,000 francs. Nous passons sur le soufre, le mercure, l’étain, que le Mexique nous montre également, ainsi que ses onyx veinés, plus beaux que ceux d’Algérie. Le Japon, qui s’était déjà distingué à l’exposition de 1867, s’est surpassé cette fois et expose jusqu’à ses méthodes scolaires. Il défie toute rivalité avec ses belles soieries, ses bronzes niellés ou cloisonnés à la patine inimitable, avec ses magnifiques porcelaines, ses laques étincelantes, ses dessins si originaux de paravent ou d’éventail. La Chine, immobilisée dans ses vieilles coutumes, pâlit devant le Japon, qui semble depuis quelques années vouloir mêler aux siennes les traditions des artistes et des savans européens.