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exposition universelle, et le lieu choisi pour celle-ci fut précisément Philadelphie, la cité glorieuse où avait été signé l’acte d’indépendance, la « Mecque de la nationalité américaine, » comme on se plaisait à l’appeler.


I. — LES PRELIMINAIRES.

Ce ne fut pas sans quelques tiraillemens que la métropole de la Pensylvanie l’emporta. New-York arguait de ce qu’elle avait plus d’habitans que Philadelphie, qui en compte cependant 800,000, et de ce qu’elle était d’un accès plus facile, d’une nature enfin plus cosmopolite et pour ainsi dire plus largement hospitalière que la ville de Penn et des quakers. A son tour, Boston rappelait que le premier sang versé pour la sainte cause avait été le sien dans le mémorable combat de Bunker-Hill, tandis que New-York était restée jusqu’à la fin le centre des forces royalistes. N’était-elle pas d’ailleurs reconnue comme l’Athènes de l’Amérique, c’est-à-dire la ville la plus cultivée, la plus ouverte aux choses de l’esprit ? New-York opposait à Boston et à Philadelphie leurs mœurs puritaines, formalistes, les façons austères et bigotes de leurs habitans, et Philadelphie reprenait que New-York, resserrée dans son île de Manhattan, et Boston dans un terrain ondulé, ne pourraient jamais offrir à une exposition internationale le vaste emplacement dont elle avait besoin. Philadelphie, au contraire, avait dans son parc de Fairmount, deux fois plus étendu que le bois de Boulogne de Paris ou le Prater de Vienne, de quoi séparer aisément une superficie de 100 hectares reconnue plus que suffisante, car aucune exposition n’avait encore occupé un espace aussi considérable. Bref, ce fut Philadelphie qui l’emporta, et dès le 3 mars 1871 un acte du congrès fédéral établissait qu’une exposition universelle internationale aurait lieu dans cette ville en 1876, et en nommait les commissaires.

Le premier pas seulement était fait. En 1872, un nouvel acte du congrès instituait un comité des finances pour cette même exposition, et fixait à 10 millions de dollars le capital d’actions qui devait être souscrit. L’année d’après, une proclamation du général Grant annonçait au peuple américain et au monde entier la solennité qui se préparait, et, en 1874, le président y invitait officiellement les diverses nations au nom des États-Unis. C’était là, avec une part effective qu’il devait prendre à l’exposition dans un bâtiment particulier, tout le concours que le gouvernement fédéral pouvait légalement apporter à ce tournoi, en laissant aux commissaires qu’il avait nommés toute la responsabilité morale et matérielle de cette affaire, et à l’initiative des états, des communes, des citoyens, le soin d’y satisfaire à toutes les nécessités économiques.