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le centre gauche ont accepté de resserrer l’union : en établissant entre les bureaux et les comités de direction une communication plus intime et plus constante que par le passé ; cela suffit pour faire espérer à M. Gambetta que le succès de son entreprise pourrait bien n’être qu’ajourné. En effet, les relations sont si suivies et si étroites entre les deux fractions les plus nombreuses du parti républicain, les divergences d’opinion se réduisent tellement à des dissentimens de conduite, à de simples questions d’opportunité, que le jour peut être prévu où, sous la pression des comités électoraux du dehors, sous l’impression des votes de résistance du sénat, le parti républicain, sauf quelques membres du centre gauche assez fermes pour résister à l’entraînement général, réaliserait enfin cette unité tant désirée par les radicaux habiles et leur chef, qui deviendrait alors le vrai général de cette grande armée. Ce jour-là, bien des républicains pourraient pousser des cris de joie ; mais il en est encore qui ne verraient dans cette fusion que la ruine de la république constitutionnelle et conservatrice, celle-là même dont M. Thiers a dit qu’elle était la seule république possible. On devine facilement quel gouvernement nous ramènerait toute autre république. Grâce à Dieu, la fusion des groupes républicains n’est qu’une hypothèse peu probable. Si la première session des chambres n’a pas tranché la question dans le sens d’une majorité de gouvernement, elle l’a laissée entière à la session prochaine, avec de sérieuses chances de succès pour cette dernière solution.


II

Comment cette session art-elle ainsi trompé les espérances des amis de la république constitutionnelle ? Comment l’établissement de cette république, confirmé et consacré par le suffrage universel, n’a-t-il point mis fin aux vieilles luttes des partis, et débarrassé la marche du gouvernement des obstacles accumulés sur ses pas par les passions et les intrigues politiques ? Comment enfin est-ce encore aujourd’hui un problème de savoir si la machine constitutionnelle pourra fonctionner sans secousses et sans accidens grâce à une majorité qui, tout en pouvant changer de conduite, selon les circonstances, reste fixe ou à peu près dans les élémens qui la composent et dans les principes qui la dirigent ? Évidemment le caractère des élections faites sur un mot d’ordre est la principale cause des embarras parlementaires ; mais ces élections elles-mêmes n’ont-elles pas leur cause dans la situation politique ou l’assemblée précédente avait laissé le pays ? Voilà ce que l’histoire parlementaire des cinq dernières années pourrait seule expliquer. Tout se tient et s’enchaîne dans la série des événemens et des situations qui se sont