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lui-même presque toutes ces opérations où notre armée nouvelle vient de s’exercer. Qu’il y ait encore bien des progrès à réaliser, c’est assez vraisemblable ; nous sommes encore en pleine réorganisation, et les lois, les institutions qui ont été consacrées depuis la guerre, ne seront complètement éprouvées que dans quelques années. Jusque-là, c’est une expérience qui se poursuit et qu’il serait d’une souveraine imprudence de troubler ou d’interrompre par des réformes précipitées et peu réfléchies. Il y a du moins dès ce moment une chose sensible et rassurante, c’est la bonne volonté avec laquelle la jeunesse française se plie aux nouveaux devoirs, et, si l’on veut, aux nouvelles charges que le patriotisme lui impose. Cette année, comme l’an dernier, les réservistes se sont rendus à l’appel avec empressement, sans murmurer ; ils ont fait leur service de vingt-huit jours en vrais soldats, zélés et disciplinés. Des officiers de l’armée territoriale se sont même joints aux récentes opérations. La France offre sans compter tout ce qu’elle a de jeunesse, le rôle des chefs militaires est de savoir coordonner, vivifier cette force destinée à rester la sauvegarde de l’honneur du pays, et c’est pour assurer à notre organisation nouvelle la garantie de l’esprit de suite que M. le ministre de la guerre maintient aujourd’hui tous les commandans de corps d’armée nommés il y a trois ans. M. le ministre de la guerre a fait depuis quelques jours deux choses également utiles : il a maintenu les commandans en chef qui ont été les premiers à mettre la main à notre reconstitution militaire, et il a rappelé à tous les généraux l’obligation de laisser l’armée, de rester eux-mêmes en dehors de toutes les agitations politiques, de tous les conflits d’opinion. C’était pour M. le général Berthaut la meilleure manière de répondre à ceux qui prétendaient déjà, dans un esprit de parti, réclamer des changemens de généraux. L’armée n’est point à un parti, elle est à la France, et c’est pour la France seule qu’elle se dévoue, qu’elle travaille, qu’elle se prépare à toutes les missions, comme elle vient de le faire dans ces sérieuses et utiles manœuvres d’automne.

Voilà qui a plus d’importance et plus d’intérêt pour la France que tous ces banquets où les radicaux de Paris et de la province se sont donné le passe-temps de célébrer, avec accompagnement de discours de circonstance, l’anniversaire de la proclamation de la première république, le 22 septembre 1792 ! Ce malheureux mois qui vient de passer si paisiblement, qui a été si utilement occupé par notre armée, a été vraiment en politique le mois des anniversaires et des épiménides. Ils sont un certain nombre, radicaux à brevet, qui ont dormi plus de quatre-vingts ans ; pour eux, rien ne s’est passé, l’histoire s’est arrêtée, l’expérience n’a point parlé : ils se sont réveillés en 1876, et voyant une république, ils ne trouvent rien de mieux pour l’honorer que de la rattacher aux souvenirs de 1792, de la coiffer du bonnet rouge du