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qu’il ne peut laisser circuler dans le pays des gens qui n’en acceptent pas les lois, les règlemens de police, et qu’il faut à la moindre infraction ramener, et Dieu sait avec quelles précautions, devant leur consul. A cela, il n’y a rien à répondre, sinon que la mesure proposée profiterait plus au Japon qu’aux Européens, que ce serait le meilleur moyen de faire pénétrer la vraie civilisation dans l’intérieur, où elle n’avance guère, et de préparer le terrain pour cette égalité internationale qui demeure l’objectif perpétuel du cabinet de Yeddo.

Ces deux questions connexes formaient, avec le droit réclamé par le Japon, de modifier à son gré les tarifs de douanes, les principaux points à débattre dans les conférences ouvertes en 1874 pour la révision des traités. Jamais pourparlers attendus avec plus d’impatience n’aboutirent à un plus chétif résultat. Des deux parts on comptait sur la réalisation des espérances caressées, et du côté des plénipotentiaires européens la confiance était si grande, qu’ils n’hésitaient pas, contrairement aux usages diplomatiques, à mentionner leur objectif dans l’adresse de nouvel an, qu’ils présentaient à l’empereur le 1er janvier 1874 : « Nos souverains désirent que la suppression de toutes les entraves apportées aux libres relations, dans l’intérieur de votre empire, entre leurs sujets respectifs et ceux de votre majesté, rende plus complets les avantages qui résultent des bons rapports déjà existans… » Le mikado répondait avec plus de réserve. C’est dans cet esprit qu’on aborda les négociations, bien résolus, les uns à ne rien céder sur les juridictions, les autres à ne pas accorder l’ouverture sans y mettre la condition tout au moins des tribunaux mixtes. La conséquence facile à prévoir fut qu’on ne put tomber d’accord sur aucune modification, et qu’après s’être avoué mutuellement que les traités ne satisfaisaient personne, on les laissa tels qu’ils étaient. Ces discussions semblent cependant avoir amené une légère détente dans la situation : on a adopté un modus vivendi plus amical que par le passé, et les puissances européennes ont donné les premières un gage de condescendance en retirant les troupes qui jusqu’ici étaient restées en station à Yokohama. Un régiment anglais, deux compagnies d’infanterie de marine françaises avaient été débarqués en 1867 et maintenus sur la concession européenne comme une sauvegarde pour les résidens. Aujourd’hui la sécurité n’étant plus menacée, et la présence des troupes ne constituant plus qu’une atteinte gratuite à l’indépendance du territoire et une dépense inutile pour la France et l’Angleterre, elles s’embarquaient au mois de mars 1875, après une fête d’adieu, au milieu des manifestations amicales de la population européenne. Un autre gage de bonne entente résulte du traité postal conclu entre le Japon et l’Amérique. Jusqu’ici la France, l’Angleterre et