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nombreux dans le Maryland et dans quelques-uns des états voisins ; ils commencent à demander que les fonds des écoles, au lieu d’être administrés directement par l’État, soient répartis entre les diverses communions chrétiennes, au prorata de leurs adhérens, de façon à permettre à chaque communion d’élever les enfants qui lui appartiennent et de faire marcher l’instruction religieuse de pair avec l’instruction littéraire. Les pétitions adressées en ce sens aux législatures de plusieurs états ont soulevé toutes les défiances des églises protestantes et spécialement de l’église méthodiste, jalouse de tout ce qui pourrait favoriser les progrès du catholicisme.

On objecte que l’adoption d’un pareil système enlèverait aux écoles leur caractère national pour ne développer que l’esprit de secte. Élevés tous ensemble, les enfans se pénètrent du même esprit : ils grandissent dans le même amour du pays, le même attachement à ses institutions, le même respect de ses lois. A changer une organisation consacrée par une heureuse expérience, on risquerait d’affaiblir le lien qui doit unir tous les citoyens d’un même pays, et de détruire l’unité morale de la nation. Les mêmes objections sont opposées aux demandes des citoyens d’extraction allemande. Une pétition, adressée aux commissaires des écoles de New-York, au nom de vingt mille résidens allemands, demandait, il y a quelques mois, que, dans les écoles où les enfans allemands seraient en majorité, l’enseignement de la langue et de la littérature allemandes devînt obligatoire, et occupât le même temps que l’enseignement de l’anglais. Dans les états du nord-ouest, où les Allemands constituent un élément considérable de la population, ils voudraient pouvoir réserver pour des écoles où l’allemand serait la base de l’enseignement, la contribution qu’ils paient au fonds des écoles… Les Américains d’origine, qui ne voient pas sans déplaisir les Allemands se grouper, former des associations particulières, se donner une organisation politique à part, et se faire marchander leurs voix par les deux grands partis politiques, ne peuvent que se montrer hostiles à cette tentative de créer et de perpétuer une nation à part au sein de la patrie commune. Lorsque les Allemands essaieront de transformer en mesures législatives leurs demandes, demeurées jusqu’ici à l’état de simples vœux, on verra bien vite cette question passionner les esprits. Le président n’avait garde de froisser les Allemands, dont les sympathies lui avaient été acquises dans ses deux élections : il n’avait pas les mêmes motifs pour ménager les catholiques, surtout lorsqu’il pouvait réveiller à leurs dépens et faire tourner à son profit les passions religieuses des sectes protestantes.

L’occasion qu’il choisit fut des plus singulières : L’association des officiers et des soldats de l’ouest qui avaient fait partie de