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serbe : il voulait conserver jusqu’au calendrier julien, en retard de onze jours sur le calendrier de l’Europe occidentale. En présentant ce mémorandum, le nouveau métropolitain priait l’empereur de soumettre ces diverses questions à la diète de Hongrie et de faire en sorte que celle-ci érigeât en lois du royaume les privilèges concédés par Léopold. Ce métropolitain mourut bientôt, et son successeur remplit moins longtemps encore les fonctions de métropolitain. Joseph Ier mourut aussi. Son successeur, Charles VI, pressé par le nouveau métropolitain serbe Popovitch, confirma par deux diplômes (2 août 1713 et 10 avril 1715) les franchises accordées aux Serbes par ses prédécesseurs ; mais la question serbe ne fut point portée devant la diète hongroise.

C’est seulement plus tard, bien après qu’une guerre heureusement menée contre les Turcs par le prince Eugène eut donné à l’empire le banat de Temesvár, Belgrade et une partie de la Serbie, que le cabinet autrichien en 1723 soumit la question serbe à la diète hongroise. Il le fit sans cacher son mauvais vouloir à l’égard des Serbes, et la diète, qui n’était déjà que trop mal disposée pour ceux-ci, se refusa à reconnaître les engagemens pris par Léopold et déclara qu’elle ne pouvait consentir au morcellement du royaume de Hongrie. Bien plus, elle vota, sans que le cabinet s’opposât à cette mesure, des lois qui contredisaient et détruisaient les concessions des patentes impériales. Les Serbes étaient entrés en Hongrie comme hommes libres et ils gardaient le droit de retourner, s’il leur convenait, dans leur pays d’origine : l’article 63 de la loi hongroise de 1723 les réduisait à l’état de serfs et les attachait à la glèbe à la merci des seigneurs féodaux ; ils ne pouvaient même pas se déplacer d’un lieu à l’autre dans le royaume. L’article 80 portait confirmation des lois antérieures qui excluaient les non-catholiques de la propriété foncière en Croatie et en Slavonie. Pour encourager les conversions au catholicisme latin, un autre article exemptait de la condition de serfs les fils des prêtres qui reconnaîtraient l’union avec Rome, pourvu qu’ils entrassent dans les ordres. C’était une prime donnée à l’apostasie. Les métropolitains essayèrent vainement d’apporter un adoucissement à la situation de leurs fidèles. L’un d’eux, Moïse Pétrovitch, obtint en 1727 de Charles VI une nouvelle confirmation provisoire des privilèges nationaux par un acte appelé mandatum protectorium, mais qui ne les protégeait nullement contre l’hostilité et les vexations de la noblesse hongroise. « L’intolérance des Magyars, dit M. Picot, fit que les Serbes considérèrent comme un bienfait l’érection des confins militaires. Les confins de la Slavonie, de la Tisza (Theiss) et de la Maros remontaient à 1702 ; ceux du banat furent organisés en 1724. Bien que le commandement fût presque toujours confié à des officiers