subordonnée à certaines conditions sans lesquelles il n’y a pas lieu de l’invoquer. Plus la combinaison de phénomènes impliquant une fin est compliquée, plus la finalité devient manifeste, en raison de la difficulté plus grande d’expliquer par la rencontre fortuite des causes la concordance qui amène le résultat final. C’est ce que montre jusqu’à l’évidence M. Janet dans une série d’analyses dont nous ne pouvons citer que la conclusion : « l’accord de plusieurs phénomènes liés ensemble avec un phénomène futur suppose une cause où ce phénomène futur est idéalement représenté, et la probabilité de cette présomption croît avec la complexité des phénomènes concordans et le nombre des rapports qui les unissent au phénomène final[1]. »
Voilà le principe de finalité, tel qu’il se dégage des œuvres humaines ; mais, outre le caractère que nous venons de leur reconnaître, et qui ne permet pas le doute sur l’idée qui a présidé à leur exécution, elles en ont un autre qui leur est propre, à savoir que l’auteur auquel elles sont attribuées a la conscience très nette de cette idée. Ce qui fait que pour toutes ces œuvres le problème de la finalité n’existe même pas. Il en est autrement des œuvres de la nature. La finalité peut y être manifeste, et il s’en trouve assurément où il semble impossible de la nier, sans se refuser à l’évidence ; cependant, quelque hypothèse que l’on adopte sur le principe de cette finalité, qu’on le suppose intérieur ou extérieur à la nature, dans les fonctions, les organes et les instincts où celle-ci le laisse voir, il est certain qu’elle n’a pas conscience de la fin par laquelle on explique son activité. Est-ce une raison de nier la finalité, si d’ailleurs elle s’y manifeste aussi clairement que dans les œuvres de l’industrie humaine ? Nullement, car le caractère par lequel se définit la finalité est tout à fait indépendant de cette condition. C’est un fait, un fait qu’il s’agit de constater pour pouvoir prononcer sur la portée finale de l’œuvre qui le contient, que cette œuvre appartienne à l’industrie humaine ou à l’industrie naturelle. Seulement, du moment que la nature ne parle que par ses œuvres, il faut, pour leur reconnaître le même principe de finalité qu’aux œuvres de l’industrie humaine, que ce langage soit d’une évidence irrésistible ; il faut de plus que toute autre interprétation que l’idée de fin en soit impossible. Le problème doit donc être ainsi posé : la finalité se montre-t-elle dans les œuvres de la nature avec les mêmes caractères que dans les œuvres de l’homme, en sorte que le phénomène soit identique dans les deux cas, abstraction faite des conditions différentes sous lesquelles il se produit ?
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