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dissimuler que, si les récens abus des prérogatives du gouvernement ont déterminé un vif courant de l’opinion en faveur de l’élection des maires, dans le cas où ils se laisseraient aller à faire de mauvais choix, le pays ne tarderait guère à demander au gouvernement de reprendre l’exercice d’une attribution qu’il a exercée jusqu’à ce jour. »


II

Avant de discuter les différens modes de nomination des maires qui ont été proposés en 1848, en 1870, en 1871, et qui seront certainement reproduits dans le débat qui va s’ouvrir devant les deux chambres, il est bon de connaître exactement les fonctions et les attributions très diverses que nos lois et nos mœurs ont mises à la charge des municipalités. Le maire est un personnage très complexe. Comme le maître Jacques de Molière, il peut revêtir divers habits et dire à ceux qui se disposeraient à lui donner des instructions : « Attendez ! Est-ce à l’homme de la commune ou à l’homme du gouvernement que vous vous adressez, car je suis l’un et l’autre ? » Le fait est qu’il est tour à tour l’un et l’autre, et que l’état comme la commune sont bien heureux de l’avoir sous la main.

Comme représentant de la commune, le maire est chargé de la police municipale, de la police rurale et de la voirie municipale. Au premier titre, il peut avoir, si l’importance de la commune le comporte, des agens de police BOUS ses ordres ; au second, il a toujours à diriger l’action des gardes champêtres. C’est lui qui doit administrer les propriétés municipales, surveiller les établissemens communaux, proposer le budget et surtout ordonnancer les dépenses. Il souscrit les marchés, passe les baux, accepte les dons et legs, représente la commune en justice, etc., après avoir pris l’avis du conseil municipal. Il est en outre investi du droit de rendre des arrêtés qui sont de véritables règlemens de police, et qui ont force obligatoire lorsqu’il se renferme dans les objets qui sont confiés par la loi à sa vigilance et à son autorité. — En sa qualité d’agent du pouvoir central, le maire a des attributions plus nombreuses encore. Officier d’état civil, il tient registre des naissances, des mariages et des décès. Officier de police judiciaire, il recherche et constate les crimes, les délits et les contraventions[1]. Juge de simple police, il a dans les communes qui ne sont pas chefs-lieux de canton certaines attributions réservées en général au juge de

  1. Dans les communes où il s’y a pas de commissaire de police, le maire est appelé par la loi à constater toutes les contraventions indistinctement. Il faut noter, et ceci est très important, qu’il est placé dans ce cas sous la surveillance du procureur-général, qui a le droit de l’avertir et même de le poursuivre en cas de négligence.