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« — Ah ! un Anglais ! Vous connaissez Ulysse Grant ?

« — J’ai ce privilège.

« — Je suppose alors que vous pouvez me dire ce qu’il compte faire avec les Indiens ? Je suis natif du Texas, et je représente le Spread Eagle ; je suppose que vous avez entendu parler du Spread Eagle ? Non ! c’est étrange. Bon, je suis venu des régions de l’est pour savoir ce que le président prétend faire relativement au territoire indien. S’il est disposé à ouvrir le pays, nous sommes tout prêts aux portes. Tout Denison passera la Rivière-Rouge. Caddo est plus près du fort Sill que Denison, et serait plus avantageux au gouvernement qu’un magasin d’armes et d’approvisionnement. Deux mots par le télégraphe, rien que allez de l’avant, amèneraient 10,000 hommes à Denison, à Caddo, à Limestone Gap, en moins d’une semaine. Cette contrée, monsieur, est le jardin de l’Amérique. » Je crains que ce journaliste n’ait raison. Cinq ans après que les contrées indiennes auront été ouvertes au capital et au travail, les Creeks et les Cherokees ne posséderont pas plus de sol dans Oklahoma qu’ils n’en possèdent dans le Massachusets et le New-York. »


III. — ROUGES, NOIRS ET BLANCS.

Une des parties les plus nouvelles de White Conquest est celle qui se rapporte aux conflits de la race rouge et de la race noire en Amérique. Pendant le cours de ses excursions dans les districts indiens, M. Dixon s’arrête à Caddo, sur le territoire des Choctaws, village exclusivement composé de zambos. Vous ne savez peut-être pas ce que c’est qu’un zambo ? En ce cas, écoutez les renseignemens que voici : « Un père indien et une mère nègre produisent un chino ; un père noir et une mère indienne produisent un zambo. La couleur du chino est d’un rouge sale, celle du zambo d’un brun sale. Le chino est un individu décharné et mal formé, et son demi-frère le zambo est encore plus laid. Il serait difficile de trouver sur terre une population aussi baroque de forme et de couleur que les nains zambos qui se couchent et se vautrent dans ces ornières. » Comment donc tant de ces singes humains se trouvent-ils réunis au même lieu ? C’est une histoire cruelle et burlesque à la fois, cruelle comme la race indienne, burlesque comme la race nègre. Avant la guerre de sécession, tous les nègres qui se trouvaient sur le territoire indien étaient esclaves, et appartenaient aux cinq tribus des Creeks, des Choctaws, des Séminoles, des Chickasaws et des Cherokees, tribus qui sont regardées comme sorties de leur état sauvage premier.

Le Scarmentado de Voltaire, cultivant sous le fouet le champ de sa vieille négresse, fit l’expérience qu’il n’y a pas au monde de lot plus dur que d’être l’esclave d’un esclave ; les nègres des