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LA CONSTITUTION DU SOLEIL.

Il paraît toutefois que la photographie devient insuffisante lorsqu’il s’agit de reproduire les détails les plus intimes de la structure des taches, de fixer les fugitives apparences que jusqu’à présent l’œil seul peut saisir[1]. Le père Secchi déclare nettement que les dessins à la main sont plus fidèles, et il cite comme particulièrement remarquables ceux que M. Tacchini, aussi habile dessinateur qu’astronome, exécute à Palerme. Au Collège romain, les dessins sont d’ordinaire faits au blanc de céruse sur fond noir. Ce qu’on a obtenu de plus beau en ce genre, c’est le grand dessin « typique » où M. Langley a réuni les détails les plus caractéristiques d’une tache solaire, et dont les reproductions commencent à se répandre.

II.

On peut dire qu’une ère nouvelle date de la découverte de ces admirables méthodes d’observation, qui vont en se perfectionnant de jour en jour et qui sans doute n’ont point dit leur dernier mot. Déjà l’on voit se fonder des observatoires spécialement destinés à les mettre en pratique : à Kew, à Oxford, à Palerme, à Wilna, à Potsdam, à Calcutta, on étudie régulièrement le soleil ; en Amérique, les Winlock, les Langley, font servir à cette étude leurs puissantes lunettes, et bientôt peut-être aurons-nous à Vincennes un établissement où se poursuivront des recherches du même ordre. Grâce à cette activité soutenue, beaucoup de faits nouveaux ont été mis au jour depuis sept ans, et plus d’un point de la météorologie solaire a été complètement éclairci ; mais il en reste beaucoup sur lesquels le débat est plus vif que jamais. Parmi les faits nouveaux, il y en a qui sont inattendus, qui soulèvent des difficultés auxquelles on n’avait pas songé ; il est certain que l’étude directe des phénomènes a fait plus de progrès que la théorie, et qu’il reste à coordonner et à expliquer tous ces faits qui s’entassent un peu à l’aventure.

Et pourtant la théorie physique du soleil est un des problèmes les plus curieux, non-seulement parce qu’elle nous renseignerait en même temps sur les innombrables soleils qui brillent au firmament comme de petites étoiles, mais encore parce que le soleil est le centre de notre monde à nous. Kepler sentait profondément l’importance de cette question. « L’influence du soleil sur ce monde, dit-il, influence d’où dérivent ici-bas tout mouvement et toute vie, tout ordre et tout ornement de la nature, est telle, que plus on la considère et plus on la trouve merveilleuse. De là pour le philo-

  1. Cela tient sans doute à l’agitation de l’air, qui produit des déviations accidentelles des rayons, et aux rapides variations de la distance focale qui résultent de réchauffement du tube.