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LA CONSTITUTION DU SOLEIL.

semble presque disparaître, comme par exemple l’été dernier. Cependant on peut s’assurer qu’elle existe partout, même au-dessus des taches ; elle y paraît plus vive qu’ailleurs. Elle est aussi remarquablement élevée et presque toujours très agitée dans le voisinage des deux pôles solaires. À sa base, la chromosphère a une teinte plus vive : c’est la couche où se rencontrent les vapeurs métalliques. Cette couche n’a pas une seconde (700 kilomètres) d’épaisseur : on la voit apparaître un instant, avec ses nombreuses raies brillantes, à la fin d’une éclipse, au moment où le limbe de la lune va démasquer le bord du soleil ; mais ce n’est qu’un éclair, ces raies brillantes sont aussitôt remplacées par les raies noires du spectre ordinaire quand le premier rayon de la véritable lumière du soleil jaillit derrière la lune. Le spectroscope permet encore de retrouver les plus fortes de ces raies, — celles du fer, du sodium, du calcium, du magnésium, — dans les protubérances qui se distinguent par un vif éclat et qui, d’après le père Secchi, sont de véritables éruptions. Sous un ciel très pur, comme à Palerme, parfois à Rome, ou sur le Mont-Sherman, où M. Young a observé à une hauteur de 2 800 mètres, on réussit même à voir les raies métalliques sur de vastes plages du contour solaire.

Les lignes brillantes que le spectre des protubérances renferme toujours, en tout temps, sont les quatre raies de l’hydrogène, qui sont aussi représentées, mais par leurs ombres noires, dans le spectre ordinaire du soleil, et une raie jaune à laquelle ne correspond aucune raie obscure du spectre ordinaire ; on suppose qu’elle appartient à une substance inconnue sur la terre, à laquelle, à tout hasard, on a donné le nom d’hélium. Il ne serait pourtant pas impossible que cette raie fût due à quelque combinaison de l’hydrogène. Les autres lignes brillantes que l’on observe accidentellement, — le catalogue dressé par M. Young en renferme une centaine, — appartiennent à des corps dont la présence était déjà annoncée par les stries noires du spectre ordinaire. Le fer est représenté par 450 raies noires, dont 25 au moins ont été vues renversées, c’est-à-dire brillantes. La présence du titane est attestée par plus de 100 raies, dont une vingtaine peuvent devenir brillantes ; le calcium en fournit 75, le manganèse 57 ; le cuivre, le nickel, le cobalt, le chrome, le sodium, le baryum, le magnésium, sont également représentés par des raies assez nombreuses pour que l’existence de ces corps dans la chromosphère puisse être considérée comme démontrée[1]. Les 33 raies du nickel, enchevêtrées dans les raies du fer, rappellent la constance avec laquelle le premier de ces deux métaux accompagne le

  1. La présence du zinc, de l’aluminium, du strontium, du cadmium, du plomb, de l’urane, est moins certaine.