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partie du Nouveau-Monde, il avait été frappé de l’immense quantité d’argent qu’on en pouvait extraire, spécialement au Mexique ; il avait exprimé son opinion en termes saisissans.


« En général, dit-il, l’abondance de l’argent est telle dans la chaîne des Andes, qu’en réfléchissant sur le nombre des gîtes de minerais qui sont restés intacts ou qui n’ont été que superficiellement exploités, on serait tenté de croire que les Européens ont à peine commencé à jouir de cet inépuisable fonds de richesse que renferme le Nouveau-Monde.

«… L’opinion que la Nouvelle-Espagne (c’était le nom officiel du Mexique) ne produit pas la troisième partie des métaux précieux qu’elle pourrait fournir dans des circonstances politiques plus heureuses a été émise depuis longtemps par toutes les personnes instruites qui habitent les principaux districts des mines de ce pays. Elle est énoncée formellement dans un mémoire que les députés du corps des mineurs ont présenté au roi en 1774 et qui est rédigé avec autant de sagesse que de connaissance des localités. L’Europe serait inondée de métaux précieux si l’on attaquait à la fois, avec tous les moyens qu’offre le perfectionnement de l’art du mineur, les gîtes de minerais de Bolanos, de Sombrerete, de Batopilas, du Rosario, de Pachuco, de Moran, de Zultapec, de Chihuahua et tant d’autres qui ont joui d’une ancienne et juste célébrité. »


Un observateur éclairé, homme instruit et d’un excellent jugement, M. Saint-Clair Duport, venu quarante ans après Humboldt, a confirmé les dires de ce savant illustre, au sujet de l’abondance des filons d’argent, par des études plus longues.


« Les schistes argileux, talqueux, chloritiques, la diorite, quelquefois des calcaires assez anciens, et plus rarement encore les porphyres, sont sur bien des points traversés par des fiions de quartz qui renferment souvent des sulfures métalliques ; quand cette circonstance se présente, il est rare qu’on ne trouve pas dans le nombre des sulfures d’argent. Ces formations fort rares, du moins au jour, dans les environs de Mexico, percent plus souvent les masses trachitiques et porphyriques en avançant vers le nord ; presque partout où elles se montrent il y a des exploitations plus ou moins importantes ; mais, quand on traverse la chaîne principale vers le golfe de la Californie, ce ne sont plus alors des points isolés, c’est toute la pointe occidentale de la cordilière qui est composée de ces roches métalliques, sillonnée des mêmes veines de quartz sur un espace immense. C’est assez dire que les gisemens travaillés depuis trois siècles ne sont rien auprès de ceux qui restent à exploiter. »


M. Duport conclut par ces paroles remarquables : « le temps viendra, un siècle plus tôt, un siècle, plus tard, où la production de l’argent n’aura d’autre limite que celles qui lui seront imposées par