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« Le projet du système monétaire que j’ai l’honneur de vous présenter, citoyens consuls, paraît devoir fixer à jamais le prix et la valeur de l’argent : le prix sera à l’abri des progressions qu’il a éprouvées depuis des temps reculés jusqu’à ce moment ; son abondance ni sa rareté ne pourront faire changer ni le poids, ni le titre, ni la valeur du franc. On ne sera pas exposé à voir effectuer des remboursemens avec des valeurs moindres que celles qui auront été prêtées ; leur dénomination équivaudra à celle de leur poids. Celui qui prêtera 200 francs ne pourra, dans aucun temps, être remboursé avec moins d’un kilogramme d’argent, qui vaudra toujours 200 francs et ne vaudra jamais ni plus ai moins. L’abondance de l’argent ou sa rareté influera sur les objets de commerce et sur les propriétés ; leur prix se réglera de lui-même dans les proportions du numéraire, mais l’argent restera au même prix. Ainsi on trouvera dans ce système la stabilité et la justice. »


Le projet de loi inséré dans le premier rapport de Gaudin commence par une série d’articles définissant le rôle attribué à chacun des deux métaux, et dont voici le texte : « Article 1er. L’argent sera la base des monnaies de la république française ; leur titre sera de neuf dixièmes de fin et un dixième d’alliage. — Article 2. Les pièces d’argent seront de 1 franc, de 2 francs, de 5 francs. — Article 3. La pièce de 1 franc sera invariablement du poids de 5 grammes, c’est-à-dire à la taille de 200 pièces au kilogramme. — Article 6. La proportion de l’or avec l’argent sera de 1 à 15 1/2. Un kilogramme d’or vaudra donc 15 kilogrammes 1/2 d’argent. Si des circonstances impérieuses forcent à changer cette proportion, les pièces de monnaie d’or seulement seront refondues. » Ainsi dans la pensée de l’auteur de la loi, Gaudin, comme dans celle de Mirabeau, l’argent est l’étalon. Il y a une pièce d’argent qui contient un poids invariable de métal fin et à laquelle tout se rapporte dans le système. A côté de la monnaie d’argent, composée de pièces de 5 francs et d’un certain nombre de pièces moindres, — les pièces d’argent au-dessous de 5 francs ne sont devenues du billon que sous le second empire, — il y a une monnaie d’or, sans parler des pièces d cuivre, qui sont du billon, mais l’or est subordonné à l’argent, et les pièces qu’on en doit faire seront d’un poids variable selon les circonstances.

Les bases que nous venons d’indiquer étaient admises par tout le monde, le gouvernement, les corps politiques, dont le plus influent était le conseil d’état, la commission des monnaies, corps administratif composé de savans, l’Institut, dont le gouvernement d’alors demandait l’avis dans les cas où sa compétence était notoire. On était unanime particulièrement à vouloir un système monétaire où les deux métaux précieux auraient leur place et seraient