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pièces qui ne sont pas des équivalens, et qui par cette raison ne doivent pas être rangées dans la monnaie même. C’est ce qu’on appelle du billon. La destination du billon est de servir 1° d’appoint dans les paiemens de quelque importance qui ne se règlent pas en sommes rondes, 2° de moyen de paiement dans les menues transactions de la vie domestique. Il y a du billon en cuivre, il y en a hors de France, en nickel, il y en a même en argent. Depuis le 27 juillet 1866, toutes les pièces françaises en argent, autres que celles de 5 francs, sont du billon. Cinq pièces de 1 franc ou deux de 2 francs plus une de 1 franc ne contiennent pas là même quantité d’argent qu’une pièce de 5 francs. Les gouvernemens trouvent dans l’émission du billon, qui leur est exclusivement réservée, l’occasion de gagner quelque chose, ce qui les a maintes fois portés à en émettre trop et à en exagérer l’usage. Le billon serait de la fausse monnaie si l’on n’avait limité strictement par la loi l’emploi qu’on en doit faire dans les paiemens, à une somme peu élevée[1].

Le mot étalon a été introduit dans la langue monétaire pour indiquer une pièce de monnaie déclarée invariable en substance et en teneur, et à laquelle se rapporte la valeur de toutes les autres pièces de monnaie, y compris celles qui seraient d’un autre métal. La loi française dit que l’unité monétaire est le franc, qui consiste en 5 grammes d’argent au titre de neuf dixièmes ; cette pièce de 1 franc est l’étalon de nos monnaies, quoiqu’elle ait disparu de la circulation depuis la loi du 27 juillet 1866, en vertu de laquelle les pièces de 1 franc sont du billon et fabriquées en conséquence. L’étalon se retrouve parfait, mais multiplié par 5, dans la pièce d’argent de 5 francs.

Le régime du simple étalon est celui où le pouvoir de constituer l’étalon monétaire sous les conditions d’un poids et d’un titre fixes est reconnu par la loi à un seul métal. Si la loi confère cette puissance à la fois aux deux métaux précieux, l’or et l’argent, il s’ensuit nécessairement qu’on établit un rapport fixe de valeur entre l’un et l’autre, car les pièces d’argent se rapportent à une pièce fixe d’or en même temps que les pièces d’or se rapportent à une pièce fixe d’argent. C’est ainsi qu’aujourd’hui en France le système du double étalon, qu’un certain nombre de personnes prétendent être établi par la loi, et qui jouit de l’existence de fait, revient à ceci, qu’entre l’or et l’argent monnayés il existe, à tort, un rapport de valeur permanent, immuable, représenté par le chiffre 15 1/2.

Le système du double étalon ne doit pas être confondu avec celui de deux monnaies légales, l’une en or, l’autre en argent ; il est indubitable que le législateur français, tout en ne voulant

  1. La loi française dit cinquante francs ; elle eût mieux fait de dire moins.