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les institutions, et, puisqu’on veut la république, il représente au pouvoir l’existence incontestée de la république dans un ordre régulier. Il a mis fin à une anomalie, à une équivoque qui n’a cessé de peser sur nos affaires depuis un an. Il faut voir la question là où elle est réellement. Les chambres qui viennent de se réunir n’ont pas la mission de tout changer, de tout transformer et de rejeter encore une fois la France dans l’inconnu. Il y a une constitution, il y a des pouvoirs définis, coordonnés, qui ont leurs droits et leurs obligations. Il s’agit de vivre, de bien vivre dans ces conditions, et avant tout il s’agissait de remettre ce que nous appellerons la franchise ou la sincérité dans le jeu des institutions nouvelles.

Le malheur c’est que, pendant près d’un an, cette franchise n’a point existé ou a paru ne point exister. Il y avait sans doute une constitution faisant de la république le régime légal de la France, et en même temps il y avait dans la place, au ministère de l’intérieur, une politique visiblement hostile, acerbe, nouant alliance avec tous les ennemis de la république, déclarant même la guerre aux autres ministres disposés à se montrer trop constitutionnels. Ce qui en est résulté, on le sait; la France a vu se développer cette politique qui se mettait en lutte contre le courant des choses, qui semblait toujours menacer le régime légal du pays, et elle a fini par s’impatienter de cette situation violente et fausse obstinément maintenue jusqu’au bout. Eh bien! c’est la politique contraire que le ministère nouveau porte maintenant au pouvoir; il représente l’apaisement, il se donne hautement, publiquement, pour mission d’en finir avec les contradictions dangereuses, de remettre la politique du gouvernement d’accord avec le caractère des institutions, de ramener, avec la sincérité, l’aisance et la confiance, dans la pratique du régime républicain créé le 25 février 1875., Voilà la différence! Aujourd’hui;, dans le gouvernement comme dans les chambres issues des élections dernières, la république est consacrée, acceptée et respectée, et tout revient ici à la question de vivre et de bien vivre dans des conditions que personne ne met plus en doute. Où donc est le prétexte d’une hostilité systématique contre un ministère où des hommes comme M. Dufaure, M. Ricard, M. le duc Decazes, représentent les intérêts divers de la France ?

On croit vraiment avoir tout dit lorsqu’on a parlé d’une politique républicaine opposée à la politique ministérielle, lorsqu’on a invoqué une majorité qui existe d’une manière générale, mais qui n’a pas eu encore l’occasion de manifester ses tendances réelles. Il y a pourtant une chose que ne devraient pas oublier ceux qui ont la prétention de s’ériger en dictateurs parlementaires, en arbitres du gouvernement : ce ministère que les suspicions poursuivent avant qu’il ait rien fait, qui est sans doute le gardien de la république, qui est tenu d’avoir l’appui du parlement,