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la rente d’iceux qu’elle nous constitua au denier douze, l’an 1570, par le susdit contrat, desquels elle n’a depuis rien acquitté. Et pour ces mêmes considérations susdites des bons offices reçus de messire Jean de Beaufort, marquis de Canillac, lui promettons aussi la somme de quarante mille écus payables au plutôt qui nous sera possible; plus lui promettons lui bailler par chacun an lorsque nous jouirons de notre bien la somme de dix mille écus de pension, et en attendant que notre domaine soit liquidé nous lui en promettons six mille. Plus lui promettons des premiers bénéfices vacans en nos terres jusqu’à la concurrence de trente mille livres de rente, et n’ayant voulu, pour certaines bonnes considérations, faire passer ceci par notaire, l’avons voulu écrire et signer de notre main, et sceller de notre sceau, promettant en foi et parole de royne vouloir inviolablement entretenir et effectuer ce que ci-dessus est contenu sans jamais le vouloir ou pouvoir révoquer, promet- tant aussi bailler au dit sieur marquis tous dons, contrats, promesses, et autres expéditions qu’il avisera lui être nécessaires pour l’entretenement et accomplissement de ce que dessus, toutes les fois et quantes qu’il nous en requerra. En témoin de quoy nous avons écrit et signé les présentes de notre main. Donné à Usson, l’an 1588, le 8 septembre.

« MARGUERITE.

« Par la royne de Navarre, sœur unique du roi,

« F0URNIER.»


N’est-il pas vrai que voilà une pièce qui dément peu ce que nous savions du caractère de Marguerite, de sa faiblesse, de sa bonté, de sa prodigalité, de son aptitude à faire des dettes, de son inclination à faire passer avant tous autres biens les affections de son esprit toujours, celles de ses sens souvent? Canillac-lui a rendu certains bons offices, et impuissante qu’elle est à les reconnaître dans le présent, elle engage l’avenir entier et donne tout sans réserve, sans mesure, avec une spontanéité de reconnaissance extraordinaire et comme d’un mouvement de tendresse irrésistible. Étonnons-nous maintenant qu’elle ait passé les dernières années de sa vie dans la gêne et aux prises avec des dettes qu’elle était impuissante à payer, »


EMILE MONTEGUT.