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à l’abri des plus mauvais vents. Beaucoup de stations habitées dans les Alpes ne présentent point les mêmes avantages. Le fort de l’Infernet, à Briançon, suspendu au sommet d’un rocher presque à pic, à une altitude d’environ 2,400 mètres, et celui des Têtes, établi à 400 mètres plus bas sur un roc aigu, forts qui gardent le défilé du Mont-Genèvre, reçoivent tous les vents de l’ouest, du nord et de l’est. Le village chef-lieu de la commune de Saint-Véran, dans les Hautes-Alpes, qui renferme près de 200 âmes, est situé à 2,070 mètres, et il a des maisons régulièrement habitées bien au-dessus de cette altitude. On petit citer beaucoup d’autres villages perchés à des niveaux qui approchent de 2,000 mètres, comme ceux des Aygliers, près Briançon, de la Bérarde en Oisans, etc. Pendant l’hiver, les maisons y sont parfois ensevelies sous la neige, et l’on circule de porte en porte par des galeries de communication. Faute de combustible ligneux, on n’y cuit le pain qu’une fois l’an, et l’on garde les morts de l’hiver pendant plusieurs semaines au grenier, le sol étant trop dur pour les enterrer. Dans ces villages, l’habitation se compose généralement d’un rez-de-chaussée bas et voûté ; le compartiment où se parque la famille n’est séparé de l’étable que par une cloison qui s’arrête à hauteur d’homme, afin de laisser arriver la chaleur dégagée par le bétail. Les habitans les plus riches font la cuisine avec une sorte d’anthracite décomposé, quelques-uns ont du bois de bouleau ou de mélèze ; la plupart ne brûlent que des fientes de vache séchées au soleil. Dans le Haut-Dauphiné et la Maurienne, il y a des mines de fer exploitées à un niveau qui dépasse 2,000 mètres, et où les ouvriers passent l’hiver dans de mauvaises baraques ; on est obligé d’y travailler l’hiver, car ce n’est que sur, la neige que l’on peut en descendre économiquement le minerai, dans des paniers en forme de traîneaux doublés en dessous d’une peau de bouc. La caserne des mines de cobalt et de nickel d’Allemont en Oisans, que M. Vaussenat, un des promoteurs les plus ardens du nouvel observatoire, a établie lui-même en 1853 et dans laquelle il a hiverné deux fois avec une centaine d’ouvriers, se trouve à une altitude de 2,150 mètres, sur une crête battue par tous les vents.

Les inconvéniens de ces habitations sont les mêmes que ceux qu’on aurait à supporter dans un observatoire construit au sommet du Pic-du-Midi. On les atténuerait beaucoup par une bonne installation : des locaux bas, voûtés, à demi, enterrés, des murs épais, un toit balayé par les vents pour éviter l’enfouissement sous la neige, et des caves garnies de provisions. Par les temps clairs et froids, les habitans du pic pourraient facilement descendre à l’hôtellerie de Sencours. Enfin un fil électrique pourrait diminuer leur