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a de toute sorte, de tous les régimes ; elles forment une tradition enrichie périodiquement d’inventions nouvelles ; elles se succèdent depuis ces belles lois de 1819 qui restent un modèle de législation, vers lesquelles on revient sans cesse, et, si l’on voulait agir sérieusement, il n’y aurait qu’une chose à faire, ce serait d’instituer une commission supérieure indépendante chargée de revoir, d’épurer, de coordonner toutes ces dispositions et de former une loi unique, une sorte de code fondamental fait autant que possible pour rester invariable au milieu de toutes les oscillations de la politique. On éviterait du moins ainsi de se perdre dans toute sorte de combinaisons qui déroutent la magistrature. Ce n’est point aujourd’hui, nous en convenons, qu’on peut songer à un travail de ce genre, et une loi partielle de plus, une loi de circonstance de plus n’était point certainement nécessaire, si ce n’est pour ajouter à la confusion. D’un autre côté, il n’est point impossible, que cette question même de l’état de siège, qu’on s’est efforcé de lier à la loi sur la presse, n’eût perdu de sa gravité ou de son opportunité, si elle eût été replacée sur son vrai terrain, si on avait voulu y voir une garantie de vigilance extérieure, non une affaire de répression intérieure, si on s’était préoccupé un peu plus des frontières, un peu moins de Paris, de Lyon ou de Marseille. Il est bien clair que l’état de siège n’est point un régime régulier ni salutaire, même pour ceux qui l’exercent et qui sont souvent les premiers à être trompés. Il n’y a qu’un intérêt supérieur de sécurité nationale qui aurait pu faire admettre que, par une sorte de consentement silencieux, le gouvernement restât armé, sous sa responsabilité, pour des circonstances imprévues et uniquement pour ces circonstances ; mais ceci évidemment suppose la garantie vivante d’un ministère subordonnant tout à une direction générale, gagnant la confiance par un esprit de franche et libre conciliation, évitant de s’alarmer outre mesure, d’alarmer le pays sur des dangers intérieurs qu’il se sent de force à dominer, et donnant à tous l’exemple de la netteté dans l’affirmation, dans la défense de ce qu’on pourrait appeler la politique de la situation, la seule politique possible de la France au moment présent.

Cette politique, qu’on a certes intérêt à connaître aujourd’hui plus que jamais à la veille des élections, est-elle donc si difficile à définir ? Elle est partout, elle apparaît sous toutes les formes, elle se présente d’elle-même dans ses traits essentiels. Il y a des choses qui ne sont pas même en question. Ainsi l’autorité de M. le maréchal de Mac-Mahon n’est l’objet d’aucune contestation, elle reste au-dessus de tous les conflits d’opinions, de toutes les polémiques. M. Laboulaye traçait l’autre jour tout un programme dans ces simples mots, qu’il prononçait devant l’assemblée : « le maréchal et la république ! » Et de fait, dans les révolutions sans nombre dont la France a fait la triste et meurtrière ex-