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LE
GOUVERNEMENT DE CHARLEMAGNE

Les institutions politiques qui régirent la société gallo-germaine au temps de Charlemagne nous sont connues par un grand nombre de documens contemporains et authentiques. Les plus précieux sont les capitulaires. On sait combien les textes législatifs nous renseignent sur le gouvernement et sur l’état social d’une époque. Il est vrai que l’étude exclusive des lois présente un danger à l’historien : elles lui montrent la société sous une apparence de régularité et d’ordre qui n’est pas toujours conforme à la réalité ; mais les capitulaires de Charlemagne ont ce privilège parmi les textes législatifs de ne pas nous faire illusion. C’est que la plupart d’entre eux ne sont pas, à proprement parler, des lois ; ils sont de simples règlemens d’administration, souvent même des instructions que le prince adressait à ses fonctionnaires, des notes confidentielles que les commissaires royaux et le roi échangeaient entre eux, Une sorte de correspondance secrète entre le chef de l’état et les principaux instrumens de sa pensée. Aussi ces capitulaires laissent-ils voir, à côté de l’ordre que Charlemagne établissait, une série de désordres et d’abus contre lesquels sa volonté avait peu de force ; ils montrent à la fois le bien et le mal, ils présentent sans nul déguisement l’état de l’empire.

Ces documens trouvent d’ailleurs leur contrôle naturel dans les écrits de toute nature qui nous sont parvenus de cette époque. Nous possédons la Vie de Charlemagne par Eginhard, qui l’a connu de très près, les Annales du même auteur, et le petit écrit du moine de Saint-Gall, qui peut être presque considéré comme un témoin oculaire, puisqu’il ne fait que rapporter naïvement ce qui lui a été raconté par des personnages de la cour de Charlemagne. Plusieurs monastères nous ont laissé des chroniques. Il y en a de toutes