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raison une réforme dans un pays à peupler en partie par l’immigration. Cette législation plus libérale, les gouvernemens antérieurs à l’empire, obligés surtout d’appliquer leurs efforts à la prise de possession du sol, n’eurent pas le temps de la donner à l’Algérie. Quand l’achèvement de la conquête non-seulement permit, mais fit un devoir de songer à l’organisation définitive du pays, les réclamations devinrent plus pressantes, les journaux algériens s’y associèrent, les assemblées coloniales insistèrent par des vœux réitérés. Les grands pouvoirs de l’état intervinrent enfin, et un sénatus-consulte du 14 juillet 1865 détermina les conditions spéciales de la naturalisation des étrangers et des indigènes musulmans et israélites en Algérie. Depuis les Israélites ont été, comme on sait, déclarés citoyens français par un décret du gouvernement de la défense nationale en date du 24 octobre 1870. L’assemblée nationale est à la vérité saisie d’une proposition tendant à l’abroger ; mais l’ajournement de cette proposition, qui date des premiers mois de 1871, semble indiquer que la chambre n’entend pas y donner de suite, qu’elle respectera au contraire une législation consacrée à cette heure par une application de près de cinq années. Le sénatus-consulte, modifié par un autre décret du 24 octobre 1870, qui simplifie la procédure de naturalisation, est demeuré à l’égard des étrangers et des indigènes musulmans le dernier état de la législation. Nous allons en indiquer les dispositions essentielles et faire connaître ensuite les résultats obtenus. On verra s’il faut lui imputer le peu d’empressement que les étrangers ont mis d’abord à rechercher notre naturalisation, ou en rendre d’autres causes responsables.

La naturalisation, il ne faut pas le perdre de vue, a un double caractère. Si elle résulte d’un contrat synallagmatique entré l’état et le demandeur, elle constitue d’autre part pour ce dernier une faveur, et une faveur de nature particulière qu’il appartient seulement à l’état d’accorder quand il y a lui-même intérêt. De là pour le candidat des obligations multiples : il doit d’abord justifier de sa capacité de la demander, prouver ensuite qu’il est digne de l’obtenir, et que l’état aura aussi du profit à la lui conférer. La capacité s’établit par. l’âge. C’est, aux termes du sénatus-consulte, celui de vingt et un ans, déjà fixé par nos lois civiles et politiques pour la majorité des personnes. La moralité du demandeur se constate, ainsi que l’intérêt de l’état, au moyen de l’enquête ouverte sur ses antécédens par les autorités compétentes. One telle enquête ne saurait se faire dans le pays d’origine du postulant ; les convenances internationales s’y opposent. Il importe moins d’ailleurs de connaître son passé dans sa patrie que sa conduite dans l’état dont il