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vivans. À la vérité, on peut dire que les agens des synthèses organiques, les germes et les cellules, constituent des agens tout à fait exceptionnels. On pourrait dire de même pour les phénomènes de désorganisation que les fermens sont aussi des agens particuliers aux êtres vivans. Je pense quant à moi que c’est là une loi générale et que les phénomènes chimiques dans l’organisme sont exécutés par des agens ou des procédés spéciaux ; mais cela ne change rien à la nature purement chimique des phénomènes qui s’accomplissent et des produits qui en sont la conséquence.

Après avoir examiné la synthèse chimique, arrivons à l’évolution organique. Les agens des phénomènes chimiques dans les corps vivans ne se bornent pas à produire des synthèses chimiques de matières extrêmement variées, mais ils les organisent et les approprient à l’édification morphologique de l’être nouveau. Parmi ces agens de la chimie vivante, le plus puissant et le plus merveilleux est sans contredit l’œuf, la cellule primordiale qui contient le germe, principe organisateur de tout le corps. Nous n’assistons pas à la création de l’œuf ex nihilo, il vient des parens, et l’origine de sa virtualité évolutive nous est cachée ; mais chaque jour la science remonte plus haut vers ce mystère. C’est par le germe, et en vertu de cette sorte de puissance évolutive qu’il possède, que s’établissent la perpétuité des espèces et la descendance des êtres ; c’est par lui que nous comprenons les rapports nécessaires qui existent entre les phénomènes de la nutrition et ceux du développement. Il nous explique la durée limitée de l’être vivant, car la mort doit arriver quand la nutrition s’arrête, non parce que les alimens font défaut, mais parce que l’enchaînement évolutif de l’être est parvenu à son terme, et que l’impulsion cellulaire organisatrice a épuisé sa vertu.

Le germe préside encore à l’organisation de l’être en formant, à l’aide des matières ambiantes, la substance vivante et en lui donnant les caractères d’instabilité chimique qui deviennent la cause des mouvemens vitaux incessans qui se passent en elle. Les cellules, germes secondaires, président de la même façon à l’organisation cellulaire nutritive. Il est bien évident que ce sont des actions purement chimiques ; mais il est non moins clair que ces actions chimiques en vertu desquelles l’organisme s’accroît et s’édifie s’enchaînent et se succèdent en vue de ce résultat qui est l’organisation et l’accroissement de l’individu animal ou végétal. Il y a comme un dessin vital qui trace le plan de chaque être et de chaque organe, en sorte que, si, considéré isolément, chaque phénomène de l’organisme est tributaire des forces générales de la nature, pris dans leur succession et dans leur ensemble, ils paraissent révéler un lien spécial ; ils semblent dirigés par quelque condition invisible dans la route qu’ils suivent, dans l’ordre qui les enchaîne. Ainsi les