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vivantes au Spitzberg et au Groënland. Observées d’abord à Udevalla, près de Gothembourg, ces coquilles se retrouvent en Dalecarlie jusqu’à 500 mètres au-dessus de la mer ; elles marquent probablement la limite extrême de l’affaissement, ou, pour employer l’expression anglaise, de la subsidence du pays au-dessous de la mer. En émergeant de nouveau pour arriver à son niveau actuel, la côte suédoise a soulevé avec elle cette boue glaciaire, et des bancs de cailloux roulés mêlés de coquilles et chargés de blocs erratiques déposés par les glaces flottantes ; ce sont les Oesars, collines qui se prolongent au loin, et portent souvent une église ou un château, celui d’Upsal par exemple. Ces Oesars, véritables formations littorales, semblent indiquer, suivant M. Erdmann, que la Baltique communiquait pendant la période glaciaire avec la Mer du Nord dans la direction de Stockholm à Gothembourg. Le long fiord appelé lac Maelar, qui s’étend de Stockholm à Koping, celui de Hjelmaren, près d’Orebro, et les lacs Wettern et Wenern sont les restes de cette mer intérieure. On y pêche encore des crustacés dont les générations successives se sont modifiées et habituées à vivre dans l’eau douce, tandis que leurs ancêtres étaient de véritables animaux marins. Ainsi, pendant et après l’époque glaciaire, la distribution des terres et des mers et leur niveau relatif ont changé. L’état actuel lui-même, si l’on juge de l’avenir par le passé, n’est probablement que temporaire et non définitif, comme on le croit généralement.

Ces changemens de niveau, ces subsidences et ces émergences de grands continens ou de grandes îles pendant et après la période de froid, ne sont pas particulières à la péninsule Scandinave. L’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande nous offrent des exemples semblables, que les savans de ces pays nous ont successivement révélés. On a vu que le même phénomène s’est produit au pied des Alpes, dans la plaine lombarde, qui n’était pas émergée pendant l’époque glaciaire. Ces dénivellations, modifiant la distribution des terres et des mers, ont amené des modifications concomitantes dans le climat, et par suite le retrait ou l’extension des glaciers. Le professeur Heer, de Zurich, a donné le premier les preuves d’une époque interglaciaire dont le climat était assez semblable à celui qui règne en Suisse actuellement. En d’autres termes, il admet deux époques glaciaires, une première plus intense et peut-être plus longue, pendant laquelle les glaciers ont atteint leur maximum de développement : c’est celle où le glacier du Rhône s’étendait jusqu’à Lyon et Vienne en Dauphiné, — puis une seconde époque de moindre extension où il déposait ses derniers blocs erratiques sur les contreforts du Jura. Voici les faits qui ont servi de point de départ aux