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animaux, et les bergers ou les expéditionnaires peuvent accompagner eux-mêmes leurs bêtes, ou les consigner à des courtiers ou commissionnaires à demeure. Tout a été disposé dans cette intention. Le parc, qui peut abriter à la fois 15,000 moutons, 6,000 porcs, 10,000 bœufs et plusieurs centaines de chevaux, couvre une étendue de 160 hectares. Il est muni d’un hôtel, d’un télégraphe, d’une bourse, de bureaux pour les employés et les divers marchands. Les étables sont toutes distinctes et couvertes, et non plus quelques-unes à l’air libre, celles des bœufs par exemple, comme à Chicago. Partout l’eau coule en abondance. Une machine la fait monter d’un puits dans un édifice spécial où sont quatre immenses réservoirs ; de là elle s’épanche dans des conduits souterrains qui l’amènent partout où il en est besoin. L’établissement est éclairé au gaz. Dans de vastes greniers sont emmagasinés séparément le foin et le maïs pour la nourriture des animaux. Les principales lignes de chemins de fer qui touchent à East-Saint-Louis convergent sur ce parc par des embranchemens. Des couloirs ingénieusement disposés permettent d’amener sans encombre le bétail des wagons dans les compartimens qui lui sont réservés, et de ceux-ci de nouveau dans les wagons quand il est vendu. D’énormes bascules, celles de Fairbanks, qui ont obtenu la grande médaille à l’exposition de Vienne en 1873, permettent de peser à la fois, sur une seule plate-forme, des troupeaux tout entiers. Elles peuvent faire équilibre à 50,000 kilogrammes et sont sensibles à un quart de kilogramme. Une balance de ce genre est un vrai monument ; il faut pour la maintenir une lourde charpente comme celle d’une maison.

Abreuvé, nourri, refait, soigné, le bétail est réexpédié vers les états qui le réclament, ou conduit dans les ateliers de boucherie mécanique et de salaison de la ville, analogues à ceux de Chicago. Un établissement spécial pour l’étouffement dans l’eau chaude, le découpage et la salaison des porcs a été édifié au voisinage du parc, et peut tuer et saler par jour jusqu’à 6,000 bêtes. Le coup d’œil du parc est curieux au moment où se font les arrivées et les expéditions. Les bergers, les conducteurs de bœufs de l’extrême ouest, la figure hâlée, les vêtemens couverts de poussière, les jambes armées de grosses bottes, le long fouet à la main, y présentent des types vigoureux et fiers, faits pour tenter le crayon de l’artiste. Le parc d’East-Saint-Louis n’existe que depuis seize mois, et, s’il n’a pas encore l’importance de celui de Chicago pour le nombre des animaux qu’il reçoit, il est mieux installé et construit, et dans quelques années égalera certainement son aîné. Saint-Louis a reçu en 1874 environ 1 million de porcs, 300,000 bêtes à