soient d’ailleurs les ressources naturelles et les forces productives, il languit toujours plus ou moins, comme le corps arrêté dans sa croissance par la lenteur de la circulation. C’est ce qu’a longtemps éprouvé la Roumanie. La viabilité y était dans les plus tristes conditions. Avant l’union des principautés et le règne du prince Charles, sous lequel s’est développé le réseau de chemins de fer, il n’y avait guère, dans l’intérieur du pays, de routes commerciales, à l’exception de celles de Bucharest à Giurgévo au sud et à Kronstadt au nord, assez mal entretenues l’une et l’autre, en tout d’abord 700 kilomètres, puis, avec ce qu’y ajoutèrent quelques travaux, tout au plus 1,500 kilomètres de routes carrossables à la rigueur, presque généralement très mauvaises et en partie seulement reliées entre elles. Des milliers de chariots attelés de bœufs, de buffles ou de chevaux offraient, avec les radeaux du Séreth et les barques du Pruth, les seuls moyens de répandre dans la circulation à travers champs, et de diriger sur le Danube, par des chemins souvent impraticables, les produits des salines, des carrières, des forêts et de l’agriculture, moyens lents et dispendieux, qui dérobent aux travaux des champs une multitude d’hommes et d’animaux. On peut juger des anomalies résultant de la difficulté des transports par ce fait que l’on trouva plus économique et moins incommode, lors du pavage de Podo-Mogoschoï, la rue principale de Bucharest, de faire venir les pavés de la Haute-Ecosse par mer que d’aller en prendre dans les carrières des Carpathes.
Tout le grand trafic était ainsi attiré vers le Danube. Ce fleuve, qui au sud décrit autour de la contrée un arc immense, est naturellement la plus large voie navigable, et partant la grande artère commerciale de tous les pays qu’il parcourt. Il était, avant les chemins de fer, la seule grande route offerte au commerce de la Roumanie. Cependant la difficulté des arrivages de terre limitait à un certain rayon la sphère de son trafic, et en hiver celui-ci souffre, par suite de l’invasion des brouillards et des frimas, une interruption naturelle. Le Danube n’en a pas moins attiré de tout temps sur ses bords la majeure partie du commerce extérieur des principautés, de même qu’il sert au trafic des ports roumains entre eux et avec la Bulgarie, notamment à l’envoi des céréales et autres produits du pays riverain à Ibraïla et à Galatz, les deux ports jusqu’où remontent les bâtimens de mer, et qui sont ainsi devenus les entrepôts maritimes du pays. Outre ces places, la Roumanie possède encore sur le Danube seize ports moindres, dont les principaux sont, en Valachie, Turnu-Sévérin et Giurgévo, celui de la capitale, et en Moldavie, au-dessous de Galatz, Réni et Ismaïl, ce dernier sur le bras de Kilia.
Il ne faut pas oublier que le Danube est en outre une des principales