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LES
PERSANS CHEZ EUX
NOTES DE VOYAGE.

RECHT, CAZBIN, LES ROUTES ET LES VILLAGES

Il y a deux ans à peine, l’Europe officielle mettait ses habits de gala pour recevoir le shah de Perse. Paris acclamait de confiance ce souverain asiatique, qui, rompant avec les préjugés de l’Orient, prétendait, disait-on, restituer son pays à la civilisation, et venait demander lui-même à l’Occident le secret de ses sciences et la clé du progrès. Il ne s’agissait de rien moins en effet pour l’Iran que d’une rénovation totale. L’Europe, ajoutait-on, secondant cette généreuse initiative, se cotisait déjà pour prêter à la Perse une partie de ses capitaux et se préparait à lui expédier par les voies rapides un état-major d’ingénieurs et de savans. La convention passée, dès le mois de juillet 1872, avec le baron Reuter parut un moment devoir faire de ce rêve une réalité. Un contrat dont l’étendue n’était guère limitée que par la bonne volonté du concessionnaire allait mettre dans la main du financier anglais toutes les ressources du pays : il ne lui restait plus qu’à laisser retomber à propos cette pluie d’or qui féconderait le sein vierge de l’Iran. Les incrédules, — il s’en trouvait plus d’un, — avaient beau répéter en sourdine : « Attendons la fin, » on leur faisait honte de leur scepticisme : l’engouement avait gagné jusqu’aux esprits sérieux. Ceux même qui blâmaient l’élasticité du programme voyaient dans le pacte, — un peu imprudent peut-être, — conclu par la Perse une preuve de plus