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et parle avec moi. Répète à Setna ce que je dis : Moi je suis sage, je ne suis pas une personne vile ; si tu désires faire ta volonté, viens au temple de Bast, à la maison ; tout y est préparé ; tu feras tout ce que tu voudras de moi. Personne au monde ne le saura. Je n’en dirai rien dans la rue. » Le jeune page alla tout répéter à Setna. Setna fit conduire une barque pour lui, s’embarqua au port et se rendit au temple de Bast. Il marcha jusqu’à ce qu’il vît une maison bien construite ; il y avait une muraille de même grandeur et un jardin au milieu. « A qui est cette maison ? demanda Setna. — C’est la maison de Tabubu, » lui fut-il répondu. Setna entra dans l’enclos pour se placer en face de la salle du jardin. On avertit Tabubu : elle descendit, saisit la main de Setna et lui dit : « La magnificence de la maison du prêtre de Bast, dame d’Anch-ta, où tu es entré, c’est une bien belle chose. Monte en haut avec moi ! » Setna monta par le perron de la maison. La salle était ornée de vrai lapis-lazuli et de vraies turquoises ; il y avait des lits nombreux drapés d’étoffe de fin lin. Beaucoup de coupes d’or étaient disposées sur un buffet, et chaque coupe était remplie de vin. On les plaça dans la main de Setna. Elle lui dit : « Qu’il te plaise manger ! » Il lui dit : « Ce n’est pas cela que je demande. » On lui présenta du pain cuit et on apporta de l’huile, selon les usages de la nourriture royale, devant lui. Setna fit un heureux jour avec Tabubu, mais il ne vit pas encore son visage. Alors il lui dit : « Finissons, allons à l’intérieur ! » Elle lui dit : « Moi, je suis sage, je ne suis pas une personne vile ; si tu désires faire ce que tu veux avec moi, il faut me céder par contrat tous tes biens. » Setna dit : « Qu’on amène le scribe ! » Il fit faire en sa faveur un contrat de cession pour tous ses biens. Une heure se passa ; on vint dire à Setna : « Tes enfans sont en bas. — Qu’on les fasse monter ! » fit-il. Tabubu se leva ; elle s’habilla d’un habit de lin ; Setna vit tous ses membres à travers l’étoffe, et son amour grandit encore. Il dit à Tabubu : « Finissons, allons à l’intérieur. — Moi, je suis sage, je ne suis pas une personne vile ; si tu désires faire ce que tu veux avec moi, fais signer tes enfans au-dessous de mon contrat pour qu’ils ne contestent pas tes biens à mes enfans. » Les enfans entrèrent, signèrent au-dessous de l’écrit. Setna reprit alors : « Finissons, allons à l’intérieur. — Moi, je suis sage, je ne suis pas une personne vile ; si tu désires faire ce que tu veux avec moi, fais tuer tes enfans pour qu’ils ne disputent pas un jour avec les miens. » Setna dit : « Qu’on fasse cette méchante action. » Devant lui, elle fit tuer ses enfans, les fit jeter en bas par la fenêtre, devant les chiens et les chats, qui mangèrent leur chair. Setna les entendit en buvant avec Tabubu. « Finissons, allons à l’intérieur ! Tout ce que tu m’as dit, je l’ai fait.