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vite. Le soleil était alors très brillant, la sève montait avec abondance, et, au moment de la chute, elle sortit en grande quantité du milieu de la partie inférieure du tronc.

« Ce bel arbre, de la famille des myrtes, est recouvert d’une écorce assez lisse : les branches se contournent un peu en s’élevant ; elles sont garnies à leurs extrémités de feuilles alternes, légèrement arquées, longues d’environ 2 décimètres sur 1/2 décimètre de large. Les fleurs sont solitaires et partent de l’aisselle des feuilles[1]. L’écorce, les feuilles et les fruits sont des aromates qui pourraient être employés dans les usages économiques à défaut de ceux que les Moluques nous ont longtemps fournis exclusivement. » Labillardière constate encore que le bois d’eucalyptus globulus servit aux réparations de la chaloupe du bord, emploi bien modeste sans doute, mais qui n’en est pas moins le prélude des applications en grand que les Anglo-Australiens en font aujourd’hui dans la construction des navires.

Pendant longtemps, l’eucalyptus globulus demeura pour quelques rares botanistes un objet de pure curiosité. Les jardins botaniques l’eurent même sans le savoir, car je l’ai vu en 1854, dans les serres du Muséum de Paris, sfus le nom d’eucalyptus glauca. A la même époque, on en voyait de beaux exemplaires dans l’orangerie de M. Demidof à San-Donato, sous le nom d’eucalyptus falcata, et les horticulteurs Cels et Noisette l’avaient cultivé sans s’en douter, le premier en 1822, le second en 1824. Les Anglais eux-mêmes, si riches en plantes australiennes, n’avaient donné à cet arbre aucune importance spéciale comme plante de jardin, par la raison sans doute que, sous sa forme juvénile et glauque, elle ne se distinguait pas assez d’autres eucalyptus très connus comme plantes d’orangerie. En Tasmanie néanmoins, les colons appréciaient et employaient à divers usages leur magnifique blue gum ou gommier bleu (c’est le nom qu’ils donnaient au globulus) ; mais pour que cette essence forestière, encore confinée dans un coin du monde, pût entrer dans

  1. Je supprime ici la suite de ces détails descriptifs, mais je tenais a noter le fait que dans l’eucalyptus globulus, tel que Labillardière l’a vu, les fleurs sont en effet solitaires à chaque aisselle de feuilles. Dans les échantillons authentiques de cet auteur, conservés au musée de Florence, où j’ai pu les consulter, ce caractère se retrouve, sauf que, par une circonstance anormale, un petit rameau latéral se termine par trois fleurs. Parmi les arbres cultivés en Europe sous le nom d’eucalyptus globulus, il en est un qui ressemble au type par le feuillage, mais qui s’en distingue par des fleurs et des fruits bien plus petits, portés trois par trois aux aisselles des feuilles par un très court pédoncule. C’est à cette espèce que M. Thuret, dans son magnifique jardin d’Antibes, donne le nom d’eucalyptus pseudo-globulus. Ce n’est pas ici le lieu de le décrire, mais je devais au moins le signaler, pour éviter la confusion avec le globulus véritable, auquel beaucoup d’auteurs sans doute ont dû le rapporter comme simple variété.