Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 12.djvu/713

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

accomplir leurs fonctions, quelle qu’en soit la nature ; c’est là qu’ils peuvent respirer. Ainsi la principale fonction du sang est d’apporter de l’oxygène aux tissus. Si donc un animal a beaucoup de sang, il aura aussi beaucoup d’oxygène et pourra bien mieux résister à l’asphyxie. Cette idée si simple a conduit M. Bert à expliquer la résistance que certains animaux, le canard par exemple, offrent à l’asphyxie. Un canard plonge dans l’eau quatre minutes sans être incommodé, tandis que pendant le même espace de temps un poulet serait noyé ; c’est qu’en effet le canard contient près de deux fois autant de sang qu’un poulet. Pour qu’un canard se noie aussi vite qu’un poulet, il suffira de le saigner, et alors en quatre ou cinq minutes de submersion le canard ainsi saigné périra. Un autre fait inattendu qui résulte des recherches de M. Bert, c’est l’inégalité qu’il y a entre la vitalité des tissus chez les animaux nouveau-nés et les adultes. On sait depuis longtemps que les animaux nouveau-nés, les petits chats par exemple, ne meurent qu’après une demi-heure, une heure de submersion. Cela ne tient qu’à une seule cause : leurs tissus consomment peu d’oxygène, et par conséquent sont lents à mourir, en sorte que l’activité des combustions entraîne, s’il y a asphyxie, une mort rapide, et que, là où un adulte meurt, un nouveau-né vit longtemps encore, là où un moineau meurt, un mollusque continuera de vivre des heures et des journées entières.

Nous arrivons maintenant à l’influence des pressions barométriques sur cet échange de gaz oxygène et acide carbonique qui constitue la respiration. C’est le sujet du travail que l’Académie des Sciences vient de couronner. Si on met un oiseau dans une cloche contenant de l’air raréfié, au bout de quelque temps il cherche à s’échapper : il respire difficilement, fait des efforts désespérés d’inspiration ; puis, après une lutte de quelques instans, il est pris de convulsions violentes et retombe sur le flanc, comme épuisé, haletant et respirant à grand’peine. Si, par un robinet, on introduit de l’oxygène dans la cloche, l’animal se ranimera, et on assistera à une véritable résurrection. Donc c’est l’oxygène qui seul entretient la respiration. Voilà le fait depuis longtemps connu, tel que Lavoisier l’a merveilleusement établi. Supposons maintenant qu’au lieu de laisser l’animal respirer tranquillement dans cet oxygène, nous abaissions la pression. L’oxygène deviendra très raréfié, et, avant que l’animal soit pris de convulsions, il faudra que la pression soit beaucoup plus faible que tout à l’heure. C’est qu’en effet, au lieu d’avoir un mélange d’oxygène et d’azote dans les proportions de 1 et de 4, nous avons de l’oxygène pur. Ce qui démontre que la mort n’est pas due à l’abaissement de la pression, c’est qu’on peut introduire de l’azote dans la cloche ; cet azote ne changera absolument rien aux conditions de l’expérience, et l’animal mourra tout aussi vite que s’il était dans l’oxygène raréfié. Que ce soit un oiseau, un mammifère ou un reptile, le fait sera toujours le même, avec cette différence que, dans une atmosphère