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est abondante, il faudrait que le nombre des travailleurs ne nous fit pas défaut.

Ce qui concerne les derniers progrès de nos connaissances sur l’ancienne Perse offre aussi beaucoup d’intérêt. On sait quelle page importante est l’inscription de Bisoutoun : elle a renouvelé toute l’histoire du règne de Darius père de Xerxès. Nous n’avons pas besoin de suivre M. Maspero dans cette autre carrière, où nous aurions seulement à redire sa recherche scrupuleuse des nouveaux élémens de la science. Une seule question nous reste à toucher d’un mot. Le livre de M. Maspero fait partie d’une collection publiée par une librairie classique, et destinée en même temps à la jeunesse qui étudie et aux gens du monde. Ira-t-il cependant de lui-même à cette double adresse ? L’auteur, il faut le dire, ne semble pas l’y avoir précisément destiné. Quoiqu’un assez grand nombre de ses pages soient bien exposées et bien écrites, un certain appareil scientifique, — notes et parenthèses d’une érudition toute spéciale, discussions de détails, citations scrupuleusement traduites, et à cause de cela même hérissées de doutes, d’équivoques, de gloses, — n’y est pas le moins du monde dissimulé. Le plan adopté ne laisse pas non plus d’engendrer quelque complication ; l’auteur ne paraît pas avoir eu pour but principal d’écrire un livre d’enseignement secondaire ; il a visé, je ne dirai pas plus haut, mais à côté, à ce qu’on appelle l’enseignement supérieur, ou même ailleurs encore, au pur profit scientifique. S’il avait écrit spécialement pour la jeunesse de nos collèges, pour l’éducation publique, comme l’ont fait avant lui en pareille occasion MM. Robiou[1] et François Lenormant[2], il aurait multiplié les traits moraux semblables à ceux que de bien faciles souvenirs viennent de nous rappeler en outre de ceux qu’il a recueillis. Il a pu penser que, dans la transformation rapide de nos connaissances sur l’Orient classique, le plus pressé, le plus praticable, non pas le moins difficile, était de hâter cette transformation, de conquérir aussi étendu et aussi incontesté que possible le nouveau domaine. Il a fait œuvre purement scientifique ; les maîtres liront son livre et s’y instruiront avant leurs élèves. Ce qui est sûr, c’est que nul ne pourra plus traiter des vivantes questions relatives aux plus anciennes annales de ces peuples historiques sans consulter son remarquable volume, écrit avec un rare savoir et une louable passion de vérité.


A. GEFFROY.

  1. Histoire ancienne des peuples de l’Orient jusqu’au début des guerres médiques, mise au niveau des plus récentes découvertes, 1 vol. in-12 ; Douniol, 1862.
  2. Manuel d’histoire ancienne de l’Orient jusqu’aux guerres médiques, 2 roi. in-12 Lévy fils, 1868.