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est entravé par la bureaucratie ministérielle, administrative et politique. D’autre part, on rappelle la grandeur de l’œuvre, la durée des travaux, l’impossibilité d’imposer aux concessionnaires des conditions précises, lorsqu’il s’agit d’une entreprise aussi longue et aussi difficile.

Si on consulte la pratique suivie jusqu’à ce jour, on trouve que le lac de Harlem a été desséché par l’état, mais qu’on a été peu satisfait de la rapidité des travaux. Aussi en 1865, pour le dessèchement de l’Y, l’état ne voulut pas intervenir, ne fournit aucune subvention, garantit seulement un intérêt de 4 pour 100, et avança des fonds dont il devait être remboursé à mesure qu’on vendrait les terrains. En ce qui concerne le Zuiderzée, la question n’est pas définitivement résolue. Pourtant il est probable qu’à raison de l’importance du travail l’état ne se dessaisira point de ses droits. Du moins les projets préparés partent de cette hypothèse, et on ne saurait nier que ce parti présente plus d’un avantage. D’abord l’état échappe à la charge des intérêts, qui serait écrasante pour une compagnie lorsqu’il s’agit d’une entreprise de seize années et d’un capital de 140 millions. En outre, l’état n’a point à craindre les aveugles reviremens de l’opinion publique, qui ont déjà plus d’une fois compromis de grandes œuvres. Enfin il dispose de ressources assez puissantes pour être en mesure de faire face à toute complication inattendue, tandis qu’une simple société pourrait succomber devant quelque difficulté nouvelle. Du reste, lorsque l’acquisition d’une province tout entière est en jeu, les raisons politiques s’ajoutent aux considérations économiques pour décider le gouvernement à garder l’initiative de l’affaire.

Toutefois, si, par un changement improbable, on prenait un autre parti, on procéderait sans doute pour le Zuiderzée comme on a fait récemment pour l’Y. L’état avancerait à la compagnie concessionnaire, sans intérêts, le quart environ de la somme totale, soit 85 millions. Cet argent servirait aux travaux des six premières années; le reste serait demandé au public, de telle sorte qu’on n’aurait à payer que dix ans d’intérêt pour 165 millions, c’est-à-dire 83 millions à peu près. On aurait donc, en chiffres ronds, une dépense totale de 325 millions.

Nous avons dit que les terrains livrés à la culture seraient de 170,000 hectares, par conséquent l’hectare vénal coûtera en moyenne 1,500 francs sans compter les intérêts des capitaux employés, ou 1,900 francs en tenant compte de ces intérêts. A Harlem, l’hectare ne revenait qu’à 1,600 francs, et la vente des terrains n’a pas compensé les frais de dessèchement, bien qu’en quelques occasions elle se soit élevée à 3,000 et 4,000 francs; mais ces prix