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et M. Desains, ont essayé d’obtenir la valeur exacte de la radiation solaire en exécutant des mesures à une grande hauteur aussi bien qu’au niveau du sol. Mais M. Desains n’a pas continué, dans cette direction du moins, les expériences qu’il avait tentées en opérant simultanément au Rhigiculm et à Lucerne avec M. Branly. Quant à M. Soret, que des études analogues ont conduit jusqu’au Mont-Blanc, il n’a pas réussi à obtenir des résultats certains, sans doute pour avoir négligé de faire observer à la base de la montagne tandis que lui-même observait au sommet.

Le seul moyen de résoudre la question consiste à effectuer des mesures simultanées en deux stations situées sensiblement sur la même verticale et présentant entre elles une différence de niveau aussi grande que possible. On peut déterminer ainsi avec toute la précision désirable l’effet produit par une colonne d’air de plusieurs kilomètres de hauteur, tandis que d’autre part l’état physique de cette longue colonne gazeuse est exactement connu par les observations météorologiques que l’on a soin de faire à chacune des stations. Tel est le principe des recherches que je poursuis depuis plus de deux ans, et en vue desquelles, avant de gravir le Mont-Blanc, j’ai déjà entrepris de nombreuses ascensions dans les Alpes du Dauphiné.

Le procédé expérimental que j’ai adopté est très simple. La boule d’un thermomètre à mercure occupe le centre d’un vase sphérique maintenu à la température de zéro degré au moyen de glace entassée entre ce premier vase et un second, extérieur et concentrique. Dans le système des deux enveloppes est pratiquée une ouverture tubulaire que l’on oriente de façon à laisser les rayons solaires tomber librement sur la boule du thermomètre. Le mercure moule aussitôt, et, au bout d’un quart d’heure environ, indique une température stationnaire qui sert à mesurer l’intensité de la radiation. On comprend de plus que l’excès de température accusé par le thermomètre dans ces conditions puisse permettre d’évaluer la température même de la source calorifique, c’est-à-dire du soleil.

Nous restâmes près de quatre heures au sommet du Mont-Blanc, et je pus y recueillir des observations que la beauté exceptionnelle de ce jour rend précieuses. La mise en œuvre de toutes les mesures obtenues nécessite des calculs un peu longs, si l’on veut en déduire la valeur exacte de l’absorption exercée par l’atmosphère, fixer la part de la vapeur d’eau dans ce phénomène, déterminer l’intensité de la radiation solaire et arriver enfin à une évaluation plausible de la température du soleil. Mais le simple énoncé des nombres que j’ai trouvés suffira pour montrer immédiatement quelle notable quantité de chaleur est interceptée par l’air alors même que le ciel