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qu’il y avait là deux spectres superposés : un spectre ordinaire, continu avec de fines raies sombres comme celui de toutes les étoiles, et un spectre gazeux, formé de quatre raies brillantes dont deux appartenaient à l’hydrogène. M. Huggins continua ses observations le lendemain et les jours suivans. L’éclat de l’astre diminuait rapidement ; en douze jours, il était tombé de la 2e à la 8e grandeur. L’examen du spectre ne laisse aucun doute sur la nature du phénomène observé. C’est une étoile qui s’est trouvée subitement enveloppée de flammes d’hydrogène en combustion. Il y a eu probablement une éruption qui a mis d’énormes volumes de gaz en liberté, et ces gaz brûlaient à la surface de l’astre en se combinant avec quelque autre élément. Un monde dévoré par le feu comme Sodome et Gomorrhe ! La provision de gaz épuisée, les flammes tombèrent, et l’étoile revint à son premier état. — N’oublions pas d’ailleurs que l’événement cosmique auquel il nous a été donné d’assister en spectateurs désintéressés en 1866 n’était point un événement contemporain ; au moment où l’éclat de cet incendie frappait nos yeux, il était peut-être éteint depuis plusieurs siècles.

On sut plus tard que l’étoile temporaire de la Couronne avait été aperçue dès le 4 mai par un observateur canadien, et qu’elle avait atteint son maximum d’éclat le 10, deux jours avant d’être découverte en Europe. Il fut enfin constaté que depuis longtemps le même astre se trouvait inscrit dans les zones de l’observatoire de Bonn comme une étoile de 9e ou 10e grandeur.

M. Faye a pris texte de cette apparition pour présenter des considérations ingénieuses sur le phénomène des étoiles variables. Les explications qui en ont été proposées autrefois ne comprennent pas les étoiles nouvelles, c’est-à-dire les astres qui augmentent brusquement d’éclat et s’éteignent ensuite sans offrir une périodicité bien caractérisée. On ne peut embrasser tous ces phénomènes dans une même explication qu’en la rattachant à des changemens de la constitution physique des astres. On s’y trouve d’ailleurs conduit par l’étude des taches solaires. La fréquence périodique de ces taches doit se traduire par des variations d’éclat du disque radieux, et il s’ensuit que le soleil lui-même est une étoile variable dont la période est de onze ans. Des taches obscures encore plus larges et plus noires expliqueraient l’affaiblissement périodique de la lumière de la plupart des astres variables ; mais rien ne nous force de supposer que les choses soient constituées de manière à durer toujours. La lumière et la chaleur qu’une étoile rayonne sont irrévocablement perdues pour elle ; à mesure qu’elle se refroidit, sa puissance d’émission, sa radiation, vont en diminuant : en un mot, elle vieillit. Si donc cette étoile présente des intermittences, rien ne prouve