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UNE
ÉPOPÉE BYZANTINE
AU XE SIÈCLE

LES EXPLOITS DE DIGÉNIS AKRITAS

I. Constantin Sathas et Émile Legrand, les Exploits de Digénis Akritas, épopée byzantine du Xe siècle, publiée pour la première fois d’après le manuscrit unique de Trébizonde, Paris 1875. — II. E. Legrand, Recueil de chansons populaires grecques, Paris 1873. — III. E. Legrand, Collection de monumens pour servir à l’étude de la langue néo-hellénique, Paris et Athènes, 1869-1874. — IV. C. Sathas, Bibliotheca grœca medii aevi, Paris et Venise, 1872-1874. — V. Auguste Dozon, Chansons populaires bulgares inédites, texte et traduction, Paris 1875. — VI. Alexandre Vessélovski, Fragment de l’épopée byzantine dans l’épopée russe, dans la Viestnik Europy, Saint-Pétersbourg, avril 1875.


I.

Un grand écrivain du XVIIIe siècle croyait pouvoir affirmer que les Français n’avaient pas le génie épique. Les découvertes de nos érudits lui ont donné tort : la Chanson de Roland, la Bataille d’Aliscans et près de cinquante autres poèmes assurent au contraire à la France du moyen âge le premier rang parmi les nations épiques. Ces œuvres remontent à une époque où notre pays, tout hérissé de châteaux-forts, peuplé d’une noblesse demi-barbare et toujours en armes, était revenu à un état social assez semblable à celui qui dans la Grèce d’Homère donna naissance à la poésie héroïque. La découverte d’une épopée byzantine paraîtra plus surprenante La civilisation hellénique du Xe siècle semble un terrain favorable à de telles productions : elles naissent ordinairement dans les sociétés