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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre 1874.

Lorsqu’il y a près de cinq mois l’assemblée se séparait sous le prétexte d’aller se recueillir, interroger le pays, renouveler au contact de la vie nationale son esprit et ses résolutions, les sceptiques, les incrédules disaient que c’était bien inutile, que l’assemblée reviendrait comme elle était partie, plus embarrassée que jamais de son rôle, de son omnipotence et de son impuissance. Est-ce vrai ? Quel changement s’est opéré dans les esprits, dans les dispositions des partis, dans l’ensemble des choses ?

Ces premiers jours, depuis que l’assemblée est revenue à Versailles, n’ont évidemment rien éclairci. On dirait que les partis se retrouvent en présence épuisés avant de combattre, hésitant à s’avancer sur un terrain qui se dérobe, plus préoccupés de s’observer que de se remettre à l’action, et le message par lequel M. le président de la république a voulu inaugurer la session nouvelle, ce message est lui-même l’expression mesurée, habilement calculée de cette sorte d’attente indécise. M. le maréchal de Mac-Mahon, il l’a dit déjà, il le répète, n’a point accepté le pouvoir pour servir les aspirations d’un parti. Attaché à « une œuvre de défense sociale et de réparation nationale, » il renouvelle son appel à « tous les hommes de bonne volonté, » à « tous ceux dont les préférences personnelles s’inclinent devant les nécessités du présent et devant la cause sacrée de la patrie ; » il réclame ce concours au nom de la France. Le poste où il a été placé le 20 novembre 1873, il ne le désertera pas, il l’occupera « a jusqu’au dernier jour avec une fermeté inébranlable et un respect scrupuleux des lois ; » mais en même temps il ne cache pas que, dans ses voyages à travers le pays, il a recueilli partout, avec l’expression d’un immense besoin de repos, le désir d’une organisation reconnue indispensable, assurant la marche des affaires, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics. Sur ce qu’il appelle lui-même des « questions si graves, » le chef de l’état ne se prononce pas,