Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 6.djvu/659

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Hadrien, parent de l’empereur, qui fut son successeur et qui commandait la légion Ire Minervia, car on a pu rétablir avec certitude la liste des légions et même celle des cohortes auxiliaires et des ailes de cavalerie.

Trajan dut attaquer la Dacie par trois côtés : deux armées franchirent le Danube au-dessus des Portes de fer, passage étroit et difficile où le fleuve se fraie péniblement une issue sur un lit de rochers, entre les sommets à pic des Balkans au sud et des Carpates au nord. Une de ces armées, partant de Singidunum (Belgrade), sur la rive droite du fleuve, le traversa aux environs de Viminacium (Kostolac), et gagna certainement la vallée supérieure de la Ternes ; la seconde le passa à Orsova pour suivre par Mehadia celle de la Czema ; une troisième dut traverser au-dessous des Portes de fer à Drobetœ (Turnu Severinu), pour rejoindre le cours du Schyl en Petite-Valachie, traverser le Balkan par le Vulcan-Pass et tourner l’armée de Décebale. L’objectif des trois corps d’invasion devait être sa capitale, Sarmizegethusa, dont les ruines se voient. au village de Varhely ou Gradiste ; les vallées de ces trois rivières y conduisaient également.

On ne peut rien dire de plus des opérations militaires de cette campagne difficile, et qui semble avoir été conduite avec autant de promptitude que d’habileté : la prise de Sarmizegethusa, le détournement par les légions d’un fleuve, la sœur du roi faite prisonnière, des places forcées, Décebale implorant la paix, tels sont les renseignemens vagues que nous fournissent les bas-reliefs de la colonne Trajane, et le résumé trop succinct de Xiphilin, un peu plus explicite toutefois sur les dures conditions imposées au vaincu vers la fin de l’année 103. La guerre avait duré deux ans, elle recommença en 104 et fut terminée en 105 par la mort de Décebale et la réduction de la Dacie en province romaine. MM. Des Vergers et Duruy ont tiré tout le parti possible des documens qui sont entre nos mains ; mais ce qu’ils n’ont pas expliqué et ce qu’il nous importe peut-être le plus de connaître, c’est l’organisation de la conquête. Les diplômes militaires de l’an 110 et de l’an 129 nous apprennent qu’il n’y eut d’abord qu’une seule province impériale consulaire et qu’elle fut presque aussitôt dédoublée pour former la Dacie supérieure et la Dacie inférieure, la première correspondant sans doute à la Transylvanie et au Banat, et la seconde à la Moldo-Valachie ; d’autres inscriptions nous permettent d’affirmer que, pour les besoins de l’administration financière, on y envoya trois procurateurs, que les impôts indirects de la Dacie tout entière furent affermés en bloc, avec ceux de la Pannonie et de la Mésie, à un seul fermier-général (conductor portorii publici) ; plusieurs monumens nous ont