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et de l’organisation de l’état à la fin du Ier siècle ? Pour procéder avec ordre, nous voudrions qu’en nous montrant au sommet de l’édifice l’empereur, il nous expliquât ce qu’étaient ses pouvoirs et de qui il les tenait, qu’il nous dit si cette fameuse lex regia, par laquelle le sénat abdiquait à chaque avènement entre les mains du nouveau souverain, était encore en vigueur, si c’était en vertu de cette convention renouvelée à chaque avènement que les Antonins reçurent, comme Vespasien et ses prédécesseurs, la faculté de tout vouloir et le droit de tout faire. Nous pensons que les titres que prenait l’empereur et dont il ornait pour ainsi dire son autorité servaient tout au plus à définir les pouvoirs que le sénat lui transmettait en une fois et sans leur assigner de limites. Comme l’empereur partageait avec cette assemblée le gouvernement des provinces, il devait recevoir la puissance proconsulaire sur toutes celles qui lui étaient attribuées, et on y ajoutait l’imperium, c’est-à-dire la plénitude des pouvoirs militaires et judiciaires attachés au commandement des armées. Cependant, comme il se trouvait à Rome certains corps affectés à sa garde personnelle et à celle de la Ville, les cohortes prétoriennes et urbaines, il dut y exercer aussi l’imperium. Son trésor à lui, le fisc, — distinct de l’ancien trésor public ou œrarium, — était alimenté par les revenus de ses provinces et par les impôts indirects de tout l’empire, tels que les droits du vingtième des héritages, qui suffisaient presqu’à eux seuls à couvrir les frais d’entretien des armées. En outre l’empereur se faisait donner à son avènement le grand-pontificat, qui mettait la religion dans sa main, et la puissance tribunitienne, qui rendait sa personne sacro-sainte ; s’il ne faisait qu’un usage modéré du consulat, c’est que ce titre ne définissait rien de plus que le proconsulat, et si les césars l’ont pris, c’était uniquement pour honorer le passé et les vieilles traditions, toujours chères au sénat. La source et la nature des pouvoirs impériaux une fois expliquées, on devrait nous dire comment ils s’exerçaient. C’est alors que l’historien aura à faire connaître ces conseils suprêmes qui depuis Auguste assistaient les chefs de l’état dans leur œuvre politique, législative et judiciaire. Il nous importerait de savoir enfin ce qu’était cette chancellerie impériale qui expédiait les affaires administratives et libellait les ordres du maître ; mais le principal intérêt pour nous serait de connaître le mécanisme de cette administration qui embrassait et régissait le monde. Nous espérons voir bientôt se répandre des notions exactes sur les grands fonctionnaires de l’empire à l’époque des Antonins, sur les deux hiérarchies parallèles des carrières sénatoriale et équestre, la première comprenant dans un ordre immuable toutes les magistratures et toutes les charges auxquelles elles