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Walsingham fit sur-le-champ savoir à lord Howard que, suivant le bon plaisir de la reine, il eût à renvoyer au port quatre de ses plus gros vaisseaux. L’amiral résista : s’il le fallait, il prendrait à sa charge l’entretien de ces bâtimens ; il se garderait bien de s’en séparer. La nouvelle qu’on lui transmettait exigeait tout au moins confirmation. Howard voulut aller reconnaître lui-même les ports de la Galice ; le 10 juillet, il n’était plus qu’à quarante lieues des côtes d’Espagne. Le vent tout à coup passa au sud. Ce vent pouvait porter la flotte ennemie sur la côte d’Angleterre. Howard craignit de s’y voir devancé ; il retourna sur-le-champ à Plymouth. Ce fut à ce mouillage qu’un corsaire écossais vint lui annoncer, le 19 juillet, l’approche de la flotte espagnole. Le 20, les deux armées étaient en présence. Les Anglais sortaient en louvoyant de la baie de Plymouth ; l’armée espagnole défilait lentement devant Eddystone et remontait la Manche toutes voiles déployées.

On vit passer d’abord douze galions portugais placés sous le commandement particulier du généralissime, le duc de Medina-Sidonia. Ces douze galions portaient près de 8,000 tonneaux, 389 canons, l, 242 matelots et 3,086 soldats. Le galion-amiral était un navire de 1,000 tonneaux, armé de 50 canons[1]. Puis vint la flotte de Biscaye, commandée par don Juan Martinez de Recalde, avec ses quatorze bâtimens, ses 5,861 tonneaux, ses 302 canons, ses 906 matelots, ses 2,117 soldats. La flotte de Castille, sous les ordres de don Diego Florez de Valdez, se présenta la troisième ; elle comptait seize navires, 8,054 tonneaux, 474 canons, 1,793 matelots, 2,924 soldats. Trois autres divisions se succédèrent : l’escadre d’Andalousie, l’escadre du Guipuscoa et la flotte du Levant. L’escadre d’Andalousie avait pour chef don Pedro de Valdez. C’était la plus forte escadre, bien qu’elle ne se composât que de onze navires. Son tonnage total était de 8,692 tonneaux, son armement de 315 canons servis par 776 matelots et 2,359 soldats. Le plus gros de ses navires portait 1,550 tonneaux, le plus faible 569[2]. L’escadre du Guipuscoa, confiée à don Miguel de Oquendo, pouvait mettre en ligne 12 navires, 7,000 tonneaux, 296 canons, 608 matelots et 2,120 soldats ; elle semblait cependant presque chétive à côté de la flotte du

  1. 1,000 tonneaux de jaugeage correspondaient alors à un déplacement total de 1,500 tonneaux. C’était la capacité d’un vaisseau de 60 canons dans la flotte de Tourville, celle des frégates de 44 au commencement de ce siècle, la Clorinde, par exemple, dont le déplacement était de 1,743 tonneaux, ou l’Armide, qui on déplaçait 1,391. Dans la division da généralissime, on comptait aussi bien que dans les autres de gros et de petits galions. Los moindres jaugeaient 166 tonneaux, portaient 14 canons, 50 matelots et 60 soldats. Un de nos bricks de 20, le Palinure, aurait offert un déplacement au moins double.
  2. L’un, sous le rapport du déplacement, eût pu être comparé à nos frégates de 52, telles que la Zénobie ; l’autre à nos corvettes de 30 construites sur le type de l’Ariane.