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REVUE DES DEUX MONDES.

Biscaye qui réduiront le prétendant à mettre bas les armes. Les Espagnols ont beaucoup mieux à faire que de se plaindre, ils ont à réorganiser l’Espagne libérale dans des conditions de fixité et d’indépendance. C’est le meilleur moyen de préparer la défaite du prétendant dont le drapeau flotte encore sur les montagnes de la Navarre.


CH. DE MAZADE.



Le Pirate malais, par le baron de Wogan.
Voyage au pays des bayadères, par M. Louis Jacolliot, Paris 1874.


Le temps n’est plus où les récits de voyages lointains étaient lus avec cette curiosité désintéressée que peuvent inspirer des contes de fées, où le lecteur ne se disait jamais qu’il lui serait possible d’y aller voir. Grâce à la vapeur, il s’attache pour nous à ces sortes de récits un intérêt plus direct et plus sérieux ; si les contrées les plus reculées ont perdu le charme mystérieux des choses placées hors de notre portée, en revanche nous savons que d’un moment à l’autre elles pourraient jouer un rôle dans notre existence, réagir sur nous à distance, et qu’il nous importe de les connaître. Aussi la vogue est-elle aux livres de voyages, et on les recherche d’autant plus qu’ils renferment plus de détails sérieux et de renseignemens pratiques. Parmi les touristes français dont les relations se lisent avec le plus d’agrément, nous citerons M. le baron de Wogan et M. L. Jacolliot. M. de Wogan, ancien officier de spahis, l’auteur des Six mois dans le Far-West, vient de faire paraître un nouveau récit aussi attachant que ses précédens ouvrages. Le Pirate malais renferme des narrations de combats homériques, des histoires de chasse, des peintures de mœurs sauvages, tout cela raconté avec une verve spirituelle qui entraîne et vous donne pour ainsi dire l’intuition des choses. À son tour, M. Jacolliot, dans ses Voyages au pays des bayadères et au pays des perles, nous fait connaître l’Inde et l’île de Ceylan sous des aspects nouveaux et parfois inattendus. Il entre dans des détails fort curieux sur les mystères des pagodes, sur les étranges fêtes religieuses célébrées par les brahmanes, sur les rapports des colons européens avec le bas peuple indigène. En parcourant ces récits, où l’on est frappé d’un accent de vérité et de sincérité, on ne peut s’empêcher de constater combien l’influence du contact des peuples civilisés est longue à se faire sentir sur ces races de l’extrême Orient, L’Inde et la Chine, l’Australie et le Japon, tous ces pays qui nous apparaissaient autrefois comme au travers d’un brouillard sont désormais presqu’à nos portes ; mais en abrégeant les distances on ne fait pas tomber les barrières morales qui séparent les races, et le sentiment de la solidarité des hommes est bien lent à naître.


Le directeur-gérant, C. BULOZ,

Le directeur-gérant, C. Buloz.