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Les frontières de la Birmanie au nord sont mal définies et peu connues ; mais elles ne dépassent pas le 28e degré de latitude. À l’est, la Birmanie est limitrophe de la province chinoise du Yunnan ainsi que du Tonkin ; du côté du nord-ouest, elle touche à la province anglaise de Chittagong ; au sud-ouest et au sud, elle est baignée par les eaux du golfe de Bengale. Toutefois il y a lieu de distinguer deux Birmanies : la Haute-Birmanie ou Birmanie proprement dite, qui constitue aujourd’hui le royaume indépendant dont le souverain réside à Mandalay, sur l’Irawady, et la Basse-Birmanie ou Birmanie anglaise, se composant de trois provinces : l’Arakan, le Pégou et le Tenasserim.

Depuis la frontière de l’extrême nord jusqu’à la Montagne-Bleue vers le nord-ouest, ainsi que sur toute la frontière de l’est, habitent, au milieu des montagnes privées de routes et couvertes de forêts de bois de teck, des peuplades fort peu civilisées et quelquefois très turbulentes. Dans le nord et le nord-ouest, ces peuplades portent le nom de Kakhyens ; dans tout l’est, ce sont des Shans, et dans le sud-est, près de la frontière anglaise, des Karenie. Les Kakhyens sont des tribus très remuantes ; pendant l’année 1872, celles des environs de Mogoung ont été particulièrement insubordonnées. Mogoung se trouve au nord-ouest de la ville de Bhamo, située sur l’Irawady, près de la frontière chinoise. C’est un lieu d’exil pour les réfugiés politiques et un foyer d’insurrection. On y trouve un fonds d’Assamites, anciens prisonniers faits en 1820 lors de la guerre entre le roi de Birmanie et les peuples de l’Assam, et que le gouvernement birman avait internés dans ce district. Mogoung est pourtant un point destiné à attirer l’attention à cause de la proximité des mines d’ambre, situées un peu plus au nord, mines qui étaient autrefois exploitées par le roi. Au commencement de 1872, ces Kakhyens attaquèrent une localité dans les environs de Mogoung et mirent à mort le résident birman ; le gouvernement central parvint néanmoins à rétablir l’ordre par le simple envoi sur les lieux d’une force de 500 hommes. Les mines d’ambre sont aujourd’hui entre les mains de Kakhyens insoumis qui les exploitent sur une très faible échelle et vont en vendre les produits dans les villages ou sur les bords de l’Irawady. Ces tribus se livrent volontiers au pillage des barques qui remontent l’Irawady au nord de Bhamo. La rivière passe par un défilé qui se trouve à peu près à mi-chemin entre Mogoung et Bhamo ; là les pillards s’embusquent dans les hautes herbes et attaquent les barques que les bateliers halent pour remonter le courant. Les barques qui descendent le fleuve et qui suivent le fil de l’eau sont à l’abri de leurs rapines.

Les Shans sont moins turbulens, leurs états sont divisés en une