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première génération fécondé par un sujet de la seconde donne des plantes vigoureuses, mais les individus qui en proviennent portent des fruits presque semblables à ceux de l’espèce maternelle. Diverses sortes de melons et de courges fournissent des résultats analogues ; d’autres, dont la distinction spécifique est incertaine, se mêlent avec une extrême facilité, et dans la descendance la fécondité se maintient aussi parfaite que dans les types originels. En résumé, les hybrides d’espèces végétales séparées par des caractères d’une certaine importance demeurent stériles, les étamines étant dépourvues de pollen bien constitué et l’ovaire incapable d’être fécondé par le pollen le mieux organisé. Dans les produits d’espèces plus ou moins voisines, la fertilité est variable depuis le cas où le sujet n’est fertile que par l’ovaire jusqu’à celui où le pollen est parfait comme celui des espèces pures. Enfui les hybrides qui continuent à se propager reviennent plus ou moins promptement aux formes des espèces productrices. Voilà ce que démontrent les laborieuses recherches de M. Naudin.

À son tour M. Godron, le savant botaniste de Nancy, adonné depuis plus de vingt ans à des expériences sur les végétaux, constate que les hybrides en général demeurent stériles. En fécondant ces mêmes hybrides avec le pollen de l’un des parens, il voit renaître la fertilité et en même temps se produire plus ou moins vite un retour au type prédominant. Toutes les investigations tendent donc à prouver que chez la plupart des espèces végétales les altérations ne prennent aucun caractère stable. De même, il est vrai, qu’il peut exister des doutes à l’égard de la fécondité durable de quelques hybrides issus d’animaux d’espèces très voisines, il règne encore dans la science une incertitude au sujet de la fertilité continue de plusieurs hybrides végétaux. En divers endroits, rapporte M. Godron, se trouvent rapprochés le sorbier des oiseaux et tel ou tel sorbier d’espèce différente ; au milieu d’eux s’élèvent des arbres qui offrent une sorte de mélange des signes caractéristiques de l’un et de l’autre ; aux yeux du botaniste, ce sont des hybrides dont la naissance s’explique par les visites incessantes des insectes mellifères qui transportent le pollen sur toutes les fleurs. D’ordinaire ces sorbiers ont peu de graines ; s’ils étaient isolés, la race sans doute s’éteindrait. Un poirier sauvage est regardé comme un hybride, et M. Decaisne reconnaît qu’il fournit également très peu de graines. Jusqu’ici la loi générale est incontestable ; mais, en présence de saules, de rosiers, de ronces, offrant à peu près tous les intermédiaires entre les formes les plus tranchées, la discussion est possible ; ces végétaux prospèrent aux mêmes lieux et témoignent d’une égale fertilité, aussi des botanistes se persuadent qu’il existe en réalité quelques espèces de saules, de rosiers, de ronces, très voisines et